Documentaire canadien sorti en salles et présenté à Sundance (2012), Indie game the movie a une double vocation : s'adresser aux fans et attirer l'attention sur le parcours des concepteurs indépendants. Le cœur de cible pourra se trouver une proximité avec ses fournisseurs préférés, l'ensemble du public sera sensibilisé à leurs ambitions et difficultés. À cette fin IGM suit trois grandes figures du jeu-vidéo indépendant : Phil Fish pour son FEZ, Jonathan Blow auteur de Braid et le tandem McMillen/Refenes pour le fameux Super Meat Boy.
Le style est empathique et par conséquent partisan, en exposant la solitude de ces individus, tout petits et nus dans la compétition ; l'industrie de masse est vilipendée, surtout pour sa complaisance avec la médiocrité. L'accent est mis sur l'investissement personnel. Tous sont des créateurs entièrement voués à leurs réalisations, à la façon d'artistes et d'inventeurs romantiques, non d'industriels. Fish par exemple se voit comme le mec ayant crée FEZ et rien de plus en somme : c'est son 'ego' dit-il. Bien que certains se montrent plus placides ou désabusés, tous les intervenants semblent très sensibles, auto-centrés (McMillen fait exception là-dessus), avec parfois un côté drama-queen décalé (notamment Fish, oscillant souvent entre abattement et agressivité). Même ceux qui revendiquent un mépris des jugements populaires cherchent une 'connexion' avec les gens, avec l'extérieur, par leurs créations ; cette validation-là pourrait remplacer toutes les autres. Les difficultés financières ou liées à la gestion sont souvent moins terribles que la confrontation aux réactions.
Sont donc abordées les problématiques liées à l'exposition publique, l'image de soi perçue et renvoyée, celle montée par le collectif anonyme. Là encore Fish est le plus fragilisé, tandis que McMillen affiche un contrôle et un relatif 'oubli' de soi. Il trouve son ultime récompense dans la satisfaction des joueurs et une espèce de communion avec des semblables (perfusés au jeu vidéo depuis le berceau), plus que dans une quête de prestige – qu'il obtient par ailleurs avec son plébiscite universel (les passages sur Metacritic en attestent). Le triomphe facile et modeste de McMillen apparaît comme une évidence, autant que les aléas connus par Mr.FEZ dont les préoccupations sont plus restreintes, plus narcissiques. La franchise de ces types rend la séance intéressante quoiqu'il arrive. Néanmoins la démarche du documentaire reste plate (sauf à la rigueur pour la BO) et superficielle pour le reste. Nulle révélation ici, concernant le marché du jeu, le rapport aux grandes corporations ou des aspects techniques (l'approche sur ce plan est réduite à quelques coups-d'œil) ; sur ce dernier point, un peu de pédagogie aurait pu être enrichissant.
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