Dernière « pépite » de ce cinéma fantastique ibérique aujourd’hui essoré, qui s’est abîmé, noyé dans son néo-classicisme, ronflant et stérile, plus codifié et rigide qu’aucun autre registre (il y a plus de free style pour n’importe quel auteur dans le slasher). Le réalisme lugubre a besoin d’un bon recyclage.
Dans Insensibles, le récit balaye le présent et le passé, avec allez-retours entre deux époques, celle de la guerre civile espagnole (nouveau cadre récurrent dans le fantastique espagnol après L’Échine du Diable et Balada Triste) où des enfants insensibles sont livrés à des expérimentations ; et une autre plus récente où un homme à bout tente de lever les secrets de sa famille et peut-être de l’Histoire.
Insensibles est à la fois rentre-dedans (sur les pas du héros) et totalement dissocié de son essence ; d’ailleurs, les enfants « insensibles » ne sont qu’un élément du décors, sur un îlot jamais atteint. Contemplant sa surface avec virtuosité, il aligne pompiérisme à tous les étages et intrigue alambiquée pour rien. Beau, inventif aussi, décousu, démoralisant et sec enfin, il rappelle Abandonnée, le crash malheureux (avec pourtant une graine de fabuleux) de Nacho Cerda.
Élégant, tendu et serré, c’est un film propre, puissant et précis dans ses effets. C’est aussi une ascension, ménageant l’étrange et le vraisemblable, vers une solution redoutée. On ne saurait ne pas aimer ; on a même toutes les raisons de se réjouir d’un travail si abouti et efficace. Pourtant on reste à quais. C’est un « bon » film, ce n’est jamais plus et comme il n’inspire rien de particulier (poésie superficielle des galeries de poupées et sur l’enfance impossible), le bilan est à la fois neutre par politesse, nul par ailleurs.
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