Le sujet avait quelque chose de profondément attrayant, mais le réalisateur suisse Stéphane Goel n'a vraisemblablement pas réussi à en extirper la substantifique moelle. On parle quand même de l'histoire d'un baron originaire de Berne, explorateur au comportement rebelle, qui s'est retrouvé de l'autre côté du globe sur cette minuscule île au large du Chili, et qui deviendra le premier gouverneur de l'archipel Juan Fernández au Chili (comprenant ladite île, rebaptisée île de Robinson Crusoé). Il l'a même achetée en 1877. Avant lui, un marin écossais Alexandre Selkirk avait déjà vécu sur l'île dès 1704, inspirant l'histoire du roman de Daniel Defoe portant le nom de l'île. Ce qu'on ne pourra pas enlever à "Insulaire", c'est le caractère incroyablement photogénique du lieu, un archipel de montagne volcanique d'une beauté à couper le souffle. Mais bon, c'est plutôt l'inverse, un docu qui en aurait fait quelque chose de moche, qui aurait été un sacré tour de force... De même, la voix de Mathieu Amalric pour évoquer les pensées de l'aristocrate explorateur en guise de narration, de temps en temps, est vraiment délicieuse, immersive. Disons simplement que le voyage au milieu de l’océan Pacifique promettait quand même une autre dimension, et s'il y a de nombreux détails intéressants tant dans l'histoire de l'île que dans le mode de vie de ses habitants actuels, dont beaucoup sont les descendants des colonies fondées à la fin du XIXe siècle (ce qui crée des liens avec les terres helvètes assez originaux). Les travaux pour (essayer de) développer les ressources agricoles et piscicoles de ce caillou esquissent à peine le portrait d'une région et de ses vulnérabilités, dont on saisit tout juste la volonté de préserver les choses telles qu'elles sont. L'autonomie politique que les habitants recherchent, autant que les contours de la définition de leur identité, auraient gagné à être bien plus explorés.