En 1947, juste après la guerre, le port de Kobe est un champ de ruines au milieu duquel ont émergé des bidonvilles où prospère le marché noir des produits alimentaires de base : riz, sucre, viande... ainsi que le trafic du corps des femmes. Dans ce système D généralisé, trois groupes essaient de mettre la main sur ces activités lucratives : une bande de petits voyous japonais, des mafieux chinois rattachés aux Triades de Kowloon, et un groupe de parias coréens. Au-delà des querelles habituelles entre groupes violents, le film de Tanaka marque l'emphase sur les conflits ethniques entre ces trois communautés, toutes victimes d'une certaine façon de la guerre et de l'éclatement de l'empire japonais, avec en filigrane le conflit identitaire intérieur des Japonais d'origine coréenne.
Le casting est complet et fait la part belle à la relation antagoniste entre Ken Takakura et Bunta Sugawara (deux des plus célèbres acteurs du genre), avec des seconds rôles de choix comme Tetsurô Tanba et Kunie Tanaka. Si le contexte d'après-guerre et les questions identitaires constituent une matière intéressante, on pourra cependant regretter quelques outrances propres au genre : acteurs excessifs dans leur jeu, emploi d'armes lourdes (lance-roquette, mitrailleuses) dans les scènes de combat, qui rangent inévitablement le film dans le cinéma d'action de série B. Le film se classe à une période où le genre est arrivé à bout de souffle et où le public cherche à voir des films d'action et de karaté, ça se ressent.