Un grand spectacle plutôt réussi pendant les deux tiers et qui s'effondre malheureusement dans son dernier a force de vouloir surjouer l'émotion et surtout son incapacité à rendre lisible les théories scientifiques énoncées. Esthétiquement fort dans la minutie que met Nolan à recréer les moindres détails de l'espace intersidéral, le film possède également la force de rendre crédible cette aventure extraordinaire d'un homme ayant foi en la science. Aux prémices de l'investiture Trumpienne à la Maison Blanche, ce n'est sans doute pas un hasard si ce personnage est le nœud central d'un scénario qui entend redonner ses lettres de noblesse à la rationalité des faits.


Il en va ainsi d'une narration qui alterne entre vision rigoureuse de la raison et l'émotion propice à des actes mues par une passion enfantine derivative de la clarté attendue. Le fil ténu qui relie ces arcs narratifs est pendant longtemps assez fin et permet de s'arrimer avec un réel intérêt pour les alternoiements d'une fratrie qui essaie tant bien que mal de faire du temps un allié éternel.


Il finit par se briser sur l'autel d'un impératif hollywoodien assez commun dans ce genre de grosse entreprise. La famille étant le terreau dramatique le plus conventionnel dans le cinéma US, il échappe difficilement au sort des bons sentiments relatifs à la construction/dissolution de celle-ci. Dans ce cas précis l'amour d'un père pour ses enfants (et plus précisément sa fille aînée) va lui faire traverser l'espace temporel à rebours de celui que l'espèce humaine est censé maîtriser sur terre pour sauver ce qui peut encore l'être de sa filiation. Le bat blesse alors en ce que cette traversée jusqu'alors spirituelle se transforme subitement en un salmigondis d'émotions frelatées, ainsi que de retournements scenaristiques assez grossiers.


Dommage car on en ressort avec la désagréable impression que ce qui aurait pu être un grand divertissement pour adultes s'il en était tenu à son intention de départ, retombe alors dans les travers de la masse des blockbusters stéréotypés pour adolescents

Créée

le 20 juin 2022

Modifiée

le 20 juin 2022

Critique lue 38 fois

3 j'aime

Critique lue 38 fois

3

D'autres avis sur Interstellar

Interstellar
Samu-L
9

Rage against the dying of the light.

Un grand film, pour moi, c'est un film qui m'empêche de dormir. Un film qui ne s'évapore pas, qui reste, qui continue à mijoter sous mon crâne épais, qui hante mon esprit. Le genre de film qui vous...

le 6 nov. 2014

432 j'aime

72

Interstellar
blig
10

Tous les chemins mènent à l'Homme

Malgré ce que j'entends dire ou lis sur le site ou ailleurs, à savoir que les comparaisons avec 2001 : L'Odyssée de l'Espace sont illégitimes et n'ont pas lieu d'être, le spectre de Kubrick...

Par

le 28 févr. 2015

331 j'aime

83

Interstellar
guyness
4

Tes désirs sont désordres

Christopher navigue un peu seul, loin au-dessus d’une marée basse qui, en se retirant, laisse la grise grève exposer les carcasses de vieux crabes comme Michael Bay ou les étoiles de mers mortes de...

le 12 nov. 2014

300 j'aime

141

Du même critique

Benedetta
Sabri_Collignon
4

Saint Paul miséricordieux

Verhoeven se voudrait insolent et grivois, il n'est au mieux que pathétique et périmé. Son mysticisme atteint des sommets de kitch dans une parabole pécheresse qui manque clairement de chaire (un...

le 13 juil. 2021

36 j'aime

3

Pas son genre
Sabri_Collignon
7

La Tristesse vient de la Solitude du Coeur!

Lucas Belvaux,réalisateur belge chevronné et engagé,est connu pour sa dénonciation farouche des inégalités sociales et sa propension à contester l'ordre établi.Ses chroniques dépeignent souvent des...

le 4 mai 2014

31 j'aime

14

Les Délices de Tokyo
Sabri_Collignon
8

Le Triomphe de la Modestie

Naomie Kawase est cette cinéaste japonaise déroutante qui déjoue volontairement depuis ses débuts la grammaire conventionnelle du 7ème art. Elle possède cet incroyable don d'injecter une matière...

le 11 août 2015

29 j'aime

5