C'est le genre de film qui a le mérite de marquer le spectateur. Objet original, Interstellar explore des lieux inviolés jusqu'alors par le cinéma, et c'est la grande force de Nolan. C'est un véritable explorateur, comme son héros. Des planètes et des mondes sortis de nulle part, avec des vagues géantes et des paysages lunaires qu'on croirait tout droit sortis de notre Antarctique, des robots futuristes au design old age, des vaisseaux remarquables de crédibilité..Bref, c'est de la science-fiction pure et dure, et inventive par-dessus bord.
Si en plus vous ajoutez à tout ça une vision particulière du sens de l'humanité et de l'univers, on a un film de qualité. Mais seulement de qualité. Tout n'est pas parfait, loin de là. Toujours ces tics, hollywoodiens, ou grand spectacle, ou comme vous voudrez:
1) Un discours sur l'amour non seulement niais et déjà vu, mais en plus servant de raccourci scénaristique vers la fin. Comment se sort-on d'un tel boulgi-boulga scientifique (par ailleurs un peu lassant à la longue)? Eh bien, on sort la solution tout terrain, celle qui passe partout, celle qui contente tout le monde, celle qui coiffe son film de la plus belle des parures moralisatrices: l'amour. L'amour arrange tout, l'amour transcende tous les problèmes du monde. Le pire, c'est que c'est un discours qui ne va pas forcément à l'encontre de ce que je pense, au fond, mais c'est si simpliste, et ça sonne tellement formaté et préfabriqué...
2) La BO de Hans Zimmer. Mis à part Gladiator, ce type m'en aura gâché des films, avec ses mélodies beaucoup trop épiques et beaucoup trop présentes.
3) Des personnages bâclés. On dirait que Nolan ne fonctionne que par archétypes à ce niveau comme pour la plupart de ses films. On a droit à l'explorateur dans l'âme (Cooper), à la fille courage (Murphy), au fils consciencieux mais sans vision. Pourquoi ne pas creuser en chacun d'eux et leur définir une véritable personnalité? Le film gagnerait en crédibilité, en intérêt, et en émotions.
4) Un ton trop souvent explicatif dans les répliques "scientifiques". D'accord, le spectateur doit être capable de suivre le raisonnement global; et si on veut une certaine crédibilité scientifique, c'est indispensable. Mais non seulement on a droit à une sorte de cours "L'Univers pour les Nuls", mais en plus, au final, tout ça reste un véritable casse-tête chinois pour le spectateur moyen.
Interstellar est donc un film riche et dense, classique instantané de science-fiction de par son originalité et sa profondeur. Il manque cependant toujours à Nolan cette indépendance complète vis-à-vis des canons hollywoodiens modernes.