Une intro bien larmoyante qui n’en finit pas de vous essorer le ciboulot avec les enjeux à venir ; des théories scientifiques à la douzaine pour donner l’illusion de la vraisemblance ; des images spatiales faisant dans l’ultra/méga/supra contemplatif – la démonstration visuelle va encore plus loin que dans une pub pour un téléviseur, c’est dire le dosage subtile des effets spéciaux ; des retournements de situation très artificiels et dont, finalement, on se fout complètement ; un climax faussement psychédélique qui lorgne franchement du côté de 2001, l’Odyssée de l’espace ; bref, autant de raisons de penser qu’il s’est bien foutu de notre gueule avec Interstellar et, vu le caractère répétitif de sa démarche, se poser la question suivante : ce ne serait pas un putain d’escroc, ce Christopher Nolan ?
Si vous avez vu Will Hunting, vous vous souvenez certainement de cette scène où le personnage éponyme – c’est cadeau – remet à sa place un trouduc qui veut faire le malin parce qu’il a lu trois bouquins. Hé bien Nolan, selon moi, c’est exactement ce type-là : pas plus qu’un bon exécutant qui se fait passer pour un génie. En élève studieux, il a dû potassé quelques Hitchcock et Kubrick pour apprendre diverses astuces narratives qui marchent à tous les coups – faux-semblants, fausses pistes, événements imprévus – et savoir où placer sa caméra pour impliquer pleinement le spectateur dans l’action.
Alors oui, sa réinterprétation du rape and revenge avec Memento était pas mal ; il s’en est plutôt bien sorti avec sa trilogie Batman – non seulement parce que la comparaison avec la version de Joel Schumacher ne pouvait que lui être flatteuse, mais aussi parce que le matériau de base était de très bonne facture (cf. l’excellent dessin-animé des années 90) ; il a su faire preuve d’un tant soit peu de créativité dans Inception ; mais à part ça, il n’en reste pas moins un cinéaste raie au milieu et pomme sur le bureau.
Même Tarantino, qui a passé plusieurs années à tenir un vidéoclub en regardant tous les films dispos, est parvenu à se libérer de ses références en se créant un style bien à lui. Nolan, de son côté, s’acharne à nous proposer toujours la même recette insipide et impersonnelle : sur une belle grosse tartine de monomythe, étalez un fond de psychologie facile à base d’introspection qui fait mal et de rédemption impossible, ajoutez quelques tranches de réalisme à la Michael Mann, et bien sûr huilez le tout avec une bonne grosse dose de marketing vantant son goût pour l’écriture, le tournage sur pellicule et les effets spéciaux à l’ancienne. Ou l’art de transformer des blockbusters en films d’auteur, et ainsi attirer une foule de spectateurs prétendument exigeants, en quête d’un cinéma vrai, esthétique, perfectionniste, intelligent – c’est malheureusement l’opinion la plus répandue sur ses films. Allez vous étouffer en bouffant votre pop-corn.