Après "Au pays du sang et du miel", Angelina Jolie dirige un blockbuster pour son second film, racontant l'histoire de Louis Zamperini, athlète olympique américain et prisonnier de guerre durant la seconde guerre mondiale. Un parcours hors du commun, qui a tout pour passionné le spectateur, sauf que ce ne sera pas le cas, la faute à un académisme et une absence d'émotions, qui nuit à cette histoire, bien trop américaine.
Louis Zamperini est né aux états-unis, de parents immigrés italiens. C'est un adolescent rebelle, il vole, se bat, fume, boit et regarde sous les jupes des jeunes femmes. Face à son comportement jetant l'opprobre sur sa famille, son frère aîné, le pousse vers l'équipe de course du lycée. Il va devenir un athlète olympique et participer aux JO de 1936 à Berlin, avant de s'engager dans l'armée et de partir combattre le Japon lors de la seconde guerre mondiale. Il est fait prisonnier de guerre, avant d'être libéré et de retrouver sa famille.
Le film commence comme "Il faut sauver le soldat Ryan", en nous mettant de suite en immersion à bord d'un bombardier. Une entrée en matière plutôt réussie, nous permettant aussi de faire la connaissance de Louis Zamperini (Jack O'Donnell), Russell Allen Philips (Domhall Gleeson), Hugh Cuppernell (Jai Courtney) et Francis McNamara (Finn Wittrock).
Une première mission qui se passe plutôt bien, malgré un retour difficile, comme l’atterrissage. Mais on sent déjà une envie de bien faire, de trop bien faire, de se consacrer plus sur l'image. Angelina Jolie est une bonne réalisatrice, elle n'a pas encore sa patte, il lui manque ce petit quelque chose, pour se distinguer de la masse. Mais elle a surtout su très bien s'entourée, avec à la photographie Roger Deakins, nominé pour l'oscar 5 fois : O'brother, The Barber, No country for old men, Skyfall et Prisoners. Alexandre Desplat à la musique, lui aussi souvent nominé aux oscars : The Queen, L'étrange histoire de Benjamin Button, Fantastic Mr Fox, Le discours d'un roi, Argo et Philomena. Cette association de talents individuels, rend le film visuellement réussi, avec une musique discrète, habillant parfaitement les images.
Mais là ou la bât blesse, c'est au niveau du scénario, pourtant écrit par les frères Coen avec Richard LaGravenese (Fisher King, Sur la route de Madison ou Erin Brockovich) et William Nicholson (Les ombres du coeur et Gladiator). Le récit est cohérent et limpide, mais aussi lisse et offrant peu d'émotions. Malgré le parcours hors du commun du héros, il y a une absence d'empathie, qui nuit au film.
Est-ce dû à la proximité d'Angelina Jolie avec Louis Zamparini ? Ils étaient voisins, elle voulait porter son histoire à l'écran, mais de ce fait, elle prend de suite position, en racontant une histoire édulcorée et en survolant très rapidement, le racisme que sa famille subit, comme lui-même, en tant qu'immigrés italiens. Ou est-ce dû au fait de se retrouver aux manettes de son premier blockbuster et de rendre une belle copie sans ratures, pour avoir l'opportunité de faire d'autres films et d'y mettre, plus d'humanité et de réalisme.
C'est techniquement irréprochable, mais artistiquement impersonnel. Une grosse machine académique, ou la sueur et la crasse ne suinte jamais sur l'écran, ou tout semble trop calculer, comme le charbon sur le visage des prisonniers. Une absence de nuances, de personnages forts, avec Jack O'Connell n'arrivant pas à se sublimer pour donner une dimension héroïque à son personnage. Même dans les moments durs, on ne ressent pas la douleur, encore moins avec sa confrontation avec Mutsushiro Watanabe (Miyavi), incarnant un directeur de prison sadique, mais caricatural. C'est son premier rôle au cinéma et il frôle à chacune de ses scènes, le ridicule en donnant l'impression de sortir d'un sketch, en n'étant jamais crédible. Un choix peu judicieux, pour un casting qui est l'autre faiblesse du film, tant il manque de charisme et de profondeur, ou Jack O'Connell vampirise tout ses camarades, en captant l'attention en permanence, tout en étant en deçà de ses performances précédentes dans "71" et "Les poings contre les murs".
Le film rassemble plusieurs autres films, en se découpant en diverses périodes : l'introduction "Il faut sauver le soldat Ryan", les 47 jours dans le canot de sauvetage "Open Water" et "Jaws", enfin celle dans le camp "Furyo". Bien sur, elle n'arrive jamais à la hauteur de ses films, dont certains sont devenus des classiques, se contentant de remplir le cahier des charges, avec toujours, cette absence d'émotions, qui est son talon d'achille.
Un biopic qui permet de découvrir le destin hors du commun de Louis Zamperini, une ode au courage, au dépassement de soi, mais si superficiel, qu'il n'emporte jamais la mise, en restant bien trop lisse, malgré son sujet fort.