Invisible Demons
Invisible Demons

Documentaire de Rahul Jain (2021)

Sans doute que j'en attendais beaucoup de la part de Rahul Jain après son incroyable "Machines", parfaitement calibré sur le fond et la forme, dans les entrailles d'une usine textile indienne avec son lot d'images incroyables. Rétrospectivement, on pourrait y déceler ce qui fait la faiblesse de "Invisible Demons", en se remémorant la séquence impliquant les gérants, dont la mise en scène n'était pas aussi percutante que les plans silencieux. Ici, dans son documentaire consacré à la pollution, cette composante-là prend malheureusement beaucoup plus d'ampleur avec des considérations plus personnelles, pas forcément incohérentes ou inutiles, mais qui en tous cas brisent le côté parfaitement huilé du reste.


Le doc interpelle, en tant que second film de Rahul Jain, par le recours à la voix off essentiellement au début et à la fin, avec une certaine lourdeur emphatique qui n'était pas vraiment nécessaire étant donnée l'ampleur du sujet. J'ai aussi trouvé que devant l'immensité du sujet des territoires, il n'est pas parvenu à réaliser une bonne synthèse et ses entretiens avec des personnes rencontrées dans la rue paraissent décharnées, sans dimension constructives les uns avec les autres. Quelques passages un peu trop faciles aussi dans l'appel à l'émotion, avec des enfants qui parlent de leurs problèmes pour respirer et les gens qui soufflent péniblement dans une machine à l'hôpital pour évaluer la santé de leurs poumons. Il y a des témoignages qui paraissent un peu trop aléatoires, à la différence de ceux de "Machines", relatifs à un cadre beaucoup plus précis. Pas trop fan de l'intégration des pérégrinations de la journaliste ou du recours un peu trop fréquent aux plans de drone.


Pour le reste Rahul Jain n'a pas perdu son regard acéré de photographe et prolonge l'exercice de son talent en faisant de la ville un espace digne d'un film de science-fiction post-apocalyptique. Avec ses nuages constants, ses fleuves partagés entre le noir de la saleté et le blanc des détergents, son petit ilot de forêt restante entouré par des autoroutes, ses vaches qui errent dans des champs de plastique en mangeant des sacs, et surtout ce dernier plan en travelling arrière depuis une décharge démentielle... "What would a world without development look like?"

Morrinson
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Mes Documentaires, Avis bruts ébruités, Top films 2021 et Cinéphilie obsessionnelle — 2023

Créée

le 3 août 2023

Critique lue 40 fois

2 j'aime

Morrinson

Écrit par

Critique lue 40 fois

2

Du même critique

Boyhood
Morrinson
5

Boyhood, chronique d'une désillusion

Ceci n'est pas vraiment une critique, mais je n'ai pas trouvé le bouton "Écrire la chronique d'une désillusion" sur SC. Une question me hante depuis que les lumières se sont rallumées. Comment...

le 20 juil. 2014

144 j'aime

54

Birdman
Morrinson
5

Batman, évidemment

"Birdman", le film sur cet acteur en pleine rédemption à Broadway, des années après la gloire du super-héros qu'il incarnait, n'est pas si mal. Il ose, il expérimente, il questionne, pas toujours...

le 10 janv. 2015

139 j'aime

21

Her
Morrinson
9

Her

Her est un film américain réalisé par Spike Jonze, sorti aux États-Unis en 2013 et prévu en France pour le 19 mars 2014. Plutôt que de définir cette œuvre comme une "comédie de science-fiction", je...

le 8 mars 2014

125 j'aime

11