Un voyage au coeur de l'animalité de l'Homme ...
Festival de Cannes 2002, année ou Le Pianiste de Roman Polanski décroche la palme d'or ; Année ou Bowling For Columbine de Michael Moore est récompensé et édifié comme un pamphlet de l'Amérique moderne.
Cette même année , un autre film fait parti de la compétition et permettra à son réalisateur de rentrer par la grande porte du 7° art avec un certain : Irréversible. Gaspard Noé n'en est pas à son coup d'essai et avait livré 4 ans plus tôt : "Seul Contre Tous". Avec ce film , Noé indiquait déjà qu'il voulait montrer de la société contemporaine ce que peu tentent d'imaginer.
Le film est desservi par un casting français exceptionnel avec Vincent Cassel possédé par son personnage, Albert Dupontel dans son rôle le plus dérangé et Monica Bellucci qui signera son film le plus éprouvant. (Philippe Nahon personage principal de " Seul contre tous" fera également une courte apparition .)
Sur un plan purement technique Irréversible est un véritable voyage nous écrasant de crasse, de pourriture ainsi que de toutes matières organiques étant plus putrides les unes que les autres. Le films est tourné en 13 séquences dont 6 plans séquences étant d'une certaine inventivité .
Les séquences sont montés à l'envers si bien que la première séquence sera alors la dernière. Ce montage permet une certaine sensation de malaise, dans le sens ou l'on ne sait pas ou est ce que nous nous trouvons mais cela instaure également un sentiment de voyeurisme en nous montrant des scènes que nous ne comprenons pas et que nous subissons jusqu'à avoir plus de précisions en connaissant la fin du film qui en est ainsi le démarrage.
La bande son du film est composée d'une fréquence de 27 hz durant la première demi heure du film , qui est censé apporter des sentiments de nausées et de vertiges au spectateur . Ce procédé marche à merveille , et nous permet durant le premier long plan séquence de rentrer dans une atmosphère inimitable et poisseuse dans une boîte underground homosexuel dénommé "le Rectum".
Durant une grande partie du film partant du début jusqu'aux trois quarts du film , la caméra est en apesanteur et n'arrête pas de tourner si bien que chaque cercle refermé par la caméra apporte une ambiance vertigineuse au possible.
L'ambiance du film est également très bien retranscrite par le fait de cette lumière provenant de néons rouges
ne permettant pas à l'oeil de décrocher l'écran.
Lors de sa projection à Cannes, Irréversible a alors déchaîné les critiques lui attribuant des qualificatifs tels que : " SCANDALEUX !" , "Immonde" ou encore "Sordide". De nombreuses personnes ont quitté la projection cannoise avant la fin des 30 premières minutes de film.
Positif questionnera même de la façon suivante : " Peut-on s'intéresser aux qualités esthétiques d'un film qui véhicule des thèmes aussi immondes ? "
Irréversible serait il alors un film immonde n'ayant que pour but son esthétisme et sa violence ( viol de plus de 9 minutes ) ?
D'un point de vue subjectif, Je pense qu'il s'agirait plutôt d'un brûlot permettant d'aborder certains thèmes de sociétés étant tout simplement banalisé.
Oui le film choque, oui le film répugne, cependant en quoi pouvons nous banaliser des actes tel que le viol ou encore même la vengeance. Depuis plusieurs années est né un mouvement cinématographique dénommé le "Rape And Revenge" banalisant ainsi ces deux pratiques dans un but d'apporter du sensationnel ainsi que de la violence anecdotique. Il s'agit de films : " La colline a des yeux " ou encore la dernière maison sur la gauche". Ces films ( néanmoins bon dans leur style) ont eu une certaine influence sur la banalisation du viol au cinéma en nous indiquant que le viol n'est qu'un détail du film ou encore que sans le viol nous ne pouvons pas avoir d'action "jouissive".
Le viol se banalise , on en parle comme si on parlait d'une actualité comme une autre ... On le retrouve parfois même dans des épisodes de séries policières dites "Tout Public".
C'est en cela que Gaspard Noé se démarque dans son originalité cinématographique. Il prend des thématiques d'une violence inouïe ayant été banalisé par la culture contemporaine et les resitues à leur place. Alors oui un plan séquence de 9 minutes sur un viol c'est long et éprouvant mais cependant cela ne sera jamais aussi éprouvant que ce que pourra vivre une véritable victime. Il rappelle à quel point ce crime n'est pas une banalité et à quel point cela reste odieux .Cela marche toutes personnes ayant déja vu Irréversible et abordant le thème du viol ne peut qu'avoir en tête cette abominable scène de viol que subi le personnage de Monica Bellucci..
Cette scène est plus efficace encore que n'importe quelle campagne de prévention sur le sujet.
L'enfant terrible du cinéma français a alors encore frappé en soulevant des tabous de sociétés comme lors de la sortie de son premier film et cela se poursuivra avec Enter The Void.
Irréversible est un voyage au coeur de la plus sombre animalité de l'espèce humaine. Noé signe alors ici un grand film où la technique cinématographique domine et met en évidence des sujets parfois prohibé par la société.