Deuxième film de David Robert Mitchell après "The myth of the american sleepover" (2011), "It follows" (ça suit) s'ouvre sur une jeune femme sortant brutalement de chez elle, petite maison de quartier résidentiel. Elle est en petite tenue, elle est effrayé mais semble être la seule à percevoir l'objet de sa terreur. Elle s'enfuit sur une plage jusqu'à laisser un message d'adieu sur le répondeur de son père, on la retrouve au petit matin morte et en partie désarticulée.
La clé de cette scène d'ouverture nous est donnée par la suite alors que Jay, une jeune femme qui vit dans un quartier résidentiel de Détroit, fait l'amour dans une voiture avec son petit ami Hugh, qu'elle connait depuis peu. Une fois l'acte fait, Hugh chloroforme Jay et l'attache sur une chaise roulante dans un bâtiment désaffecté et presque en ruine. Vient l'explication : Hugh est victime d'une malédiction sexuellement transmissible, tant qu'il ne trouvait pas quelqu'un avec qui faire l'amour, il était suivi par une créature multiforme cherchant manifestement à tuer. Hugh a transmis la malédiction à Jay mais celle-ci doit survivre, car si elle meurt, la créature reviendra au porteur précédent et ainsi de suite.
L'histoire s'inscrit dans ce que le cinéma d'horreur a su produire majoritairement dans les années 80 et 90. Le tueur qui suit rappelle "Halloween la nuit des masques" de John Carpenter, sorti en 1978, ainsi que ses trop nombreuses déclinaisons et influences comme les sagas "Vendredi 13" (1980) et "Les griffes de la nuit" (1984). La malédiction transmissible rappelle quant à elle le film "Ring" d'Hideo Nakata sorti en 1998, et également, ses trop nombreuses déclinaisons.
Mais si l'inspiration et la référence – comme "La féline" de Tourneur (1942) - sont effectivement là, David Robert Mitchell sait rester à distance de ses aînés.
"It follows" est un film minimaliste, épuré, à la photographie somptueuse (Mike Gioulakis), à la beauté formelle qui fascine et qui sait se montrer inventive quand il s'agit de faire peur.
C'est dans la maitrise que ce film fonctionne, là où la caméra n'insiste pas mais suggère, laisse le doute s'instaurer en laissant un anonyme marcher doucement vers Jay sans que l'on sache s'il s'agit de la mort ou d'un quidam. La musique, électronique et minimaliste – référence au travail de John Carpenter sur ses films – sait se montrer lancinante et efficace. Nous la devons à Richard Vreeland, connu sous le nom de Disasterpeace pour son superbe travail sur le jeux vidéo "Fez" (2012).
C'est dans l'excès que ce film échoue, là où l'invisible projette un corps et saisi les cheveux de Jay, là où la créature devient enfant aux yeux noirs qui feule de colère, de minces concessions à une esthétique convenue et actuelle de l'horreur qui rentrent en collision avec la subtilité qui, heureusement, domine.
Le final est une terrible association de ces deux points : maitrise et excès.
A la fois référence maitrisée au film de Tourneur ("La féline") où la piscine devient l'endroit où l'on rode et où l'on laisse à qui veut le voir que le monstre a prit la forme du père de Jay – père que l'on ne voit que sur les photos de famille.
A la fois évacuation excessive de cette mort qui suit, qui marche, sans fatigue et sans s'arrêter.
"It follows", malgré quelques boursoufflures, est un film réussi, esthétiquement superbe et d'une subtilité bienvenue.
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