J'ai perdu mon corps
7.4
J'ai perdu mon corps

Long-métrage d'animation de Jérémy Clapin (2019)

Cinq doigts qui forment et supportent une main. Qui se déplace comme une araignée. Mais avec trois pattes de moins.


Une main douée de vie qui s'évade d'un hôpital, pour sentir sous ses doigts la texture des toits, des gouttières, puis celle de l'asphalte et du béton. Le grisâtre de la ville mute à la fois en balade poétique urbaine, ponctuée par un je suis là écrit à la peinture blanche, et en menace constante. Où les rencontres se finissent à coups de bec et de dents dans les bas-fonds du métro. Où les perspectives les plus insolites sur un environnement familier ravissent et étonnent.


L'évasion se transforme en spleen, en pèlerinage riche de souvenirs et d'images. Le passé et le présent qui s'entremêlent, tout comme les techniques d'animation utilisées pour donner chair palpable à ce qui est présenté, d'abord, comme une errance.


Le passé est idéalisé : il se passe des petits chagrins oubliés pour illustré le bonheur de l'enfance. Sa curiosité, ses rêves fous et ses passions. Et ses sensations, qui pourraient apparaître abstraites à l'image mais qui réussit le prodige animé de faire sentir le sable glisser entre ses doigts.


Cinq doigts pour cinq sens tour à tour sollicités. Le corps n'est donc pas totalement perdu. Du toucher lorsque cette petite main caresse les doigts de notre fugitive. Ou de l'ouïe le temps d'un délicat et fragile dialogue entretenu face à un interphone, où les plus beaux sentiments sont convoqués.


Une ouïe mise à profit via un vieux magnétophone enregistreur, qui a figé à la fois, chaque bruit du bonheur et chaque fracas de la tragédie. Qui dit aussi que malgré tout cela, on survit et on dribble la vie pour la tromper. Pour compter et être aimé. Et créer. De ses propres mains qui semblent douées de vie.


Le mouvement est donc constant à l'image, tout comme les trouvailles et la variété des décors et des perspectives adoptées. Et surtout, l'émotion.


De l'amour à la colère, de l'incompréhension à la souffrance, de la timidité surmontée à la tristesse, J'ai Perdu mon Corps passe par tous ces états dans un tourbillon, comme le spectateur, en transcendant les sens et en s'imprégnant d'une certaine nostagie et du temps qui passe.


Et d'une lumière dans la nuit : celle de cette rencontre inattendue, enveloppant constamment le film d'une poésie qui rappelle, à chaque instant, la fragilité de la vie. Naoufel la tourne vers une quête de sens où peut importe, finalement, le bout du chemin. C'est de voyage dont il est question.


J'ai Perdu mon Corps parle avec les mains d'un voyage au charme éthéré où l'on se surprend, inexplicablement à penser au mot « complétude ».


Behind_the_Mask, qui a la main baladeuse.

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le 20 nov. 2019

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Behind_the_Mask

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