J'ai vécu l'enfer de Corée par Ninesisters
The Steel Helmet compte parmi les rares films américains consacrés à la Guerre de Corée, conflit opposant les forces communistes du Nord – soutenues par la Chine et l'Union Soviétique – à l'armée du Sud épaulée par les Occidentaux. Fait notable : il a été produit en 1952, soit pendant le conflit. En soi, cela n'a rien d'extraordinaire ; de nombreux films de guerre furent tournés pendant la Seconde Guerre Mondiale. Mais à la différence de ces long-métrages, ici point de propagande patriotique ; Samuel Fuller n'essaye même pas de donner le change, comme il le fera plus tard dans Merrill's Marauders.
Pour son premier film de guerre, le réalisateur hérite d'un petit budget ; cela se sent. Il va pourtant faire de son mieux avec des décors limités et un faible nombre d'acteurs, notamment en recourant aux stock-shots sur la fin ; ce qui explique que la Corée se mette à ressembler étrangement à la campagne française, avec ses églises à l'horizon.
L'histoire de The Steel Helmet est des plus simples : un sergent désabusé, vétéran de la Seconde Guerre Mondiale, rejoint un peu malgré lui une équipe constituée essentiellement de bleusailles pour une mission réellement dangereuse. Le scénario sert avant tout de prétexte pour nous montrer des soldats songeant plus à leur prochaine permission qu'à la patrie où je ne sais quoi encore, ce qui les rend humains malgré leurs comportements un peu stéréotypés – il faut pouvoir tout savoir sur eux au premier regard.
Samuel Fuller profite de son film pour évoquer de nombreux sujets brûlants – comme le racisme – avec parfois un manque de délicatesse mais un véritable courage pour l'époque. Il s'agit d'un des très rares films américains revenant sur un élément majeur (et trop souvent passé sous silence) de la Seconde Guerre Mondiale : l'enfermement des Japonais et des Américains d'origine japonaise dans des camps de concentration aux USA. Décidément, le réalisateur – loin de faire l'apologie de la guerre – aime appuyer là où ça fait mal.
Si le film se trouve plus ou moins sur des rails la majeure partie du temps – il se laisse suivre sans déplaisir mais son évolution surprend peu – la fin s'avère beaucoup plus radicale et percutante, mettant en scène un événement osé qui va profondément marqué les personnages. A partir de cet instant puis pendant tout le combat qui suivra, The Steel Helmet va gagner une dimension nouvelle pour se transformer en véritable coup de poing dans le ventre du spectateur.
Samuel Fuller réalise une première percée dans le cinéma de guerre parfaitement réussie, qui préfigure son immense The Big Red One. Il ne s'agit pas d'un immanquable du film de guerre, mais d'une œuvre atypique loin d'être inintéressante ; amateur du genre et du réalisateur, aucune raison de passer à côté.