The horror... the horror...
Cela faisait un bout de temps que je devais m’attaquer à la carrière de Samuel Fuller, figure iconique du cinéma de guerre Américain. Un homme que je trouve absolument passionnant en interview. C’est avec J’ai vécu l’enfer de Corée que je débute, donc. Le moins que l’on puisse dire, c’est que pour un film traitant de la guerre de Corée (rappelons les dates : 50-53), il pointe le bout de son nez assez tôt, dès 1951. A peine la guerre commencée, Fuller saute donc sur l’occasion pour raconter autant que dénoncer ce sujet qui lui tient tant à cœur de par ce qu’il a vécu en première ligne durant la Seconde Guerre Mondiale.
En fait, je trouve ça presque visionnaire. Car il y a de tout dans The Steel Helmet (le titre original est tout de même plus sympa) : on appose déjà, avant l’heure, une réflexion sur la Seconde Guerre Mondiale (alors que la mode est à faire des films de guerre très unilatéraux), une réflexion sur la guerre de Corée, et enfin une vision de ce que sera plus tard la guerre du Viet-Nam. C’est très impressionnant. Car pour la première fois depuis longtemps, les soldats Américains se retrouvent devant une guerre hybride, menée tantôt sur un front par des armées régulières, tantôt dans la forêt par une guérilla impitoyable qui se cache fort bien. Et l’enfer est réellement là, car non seulement on est perdu, on a peur car on est en guerre... mais en plus, on ne sait pas où elle est cette guerre, d’où est-ce que la mort vient.
Ça n’est pas évident, en 1951, de pouvoir comprendre la guerre ainsi, et de pouvoir la représenter ainsi. Bien sûr, ça n’est pas non plus une boucherie, mais il y a une dureté dans le traitement de Fuller qui ne laisse pas indifférent. Jamais il ne faut perdre de vue qu’au-delà des idéaux, au-delà du courage, au-delà de la gloire (tiens tiens...), la guerre demeure horrible. Non pas par ce qui est montré directement, mais par ce que cela cause auprès des hommes, par ce que cela cause de voir un ami exploser sur une mine quand il s’y attendait le moins. On peut également ressentir l’inspiration dans le traitement de la guerre d’Erich Maria Remarque avec A l’Ouest rien de nouveau, et également Milestone avec le film éponyme.
On retrouve dans The Steel Helmet beaucoup d’éléments qui inspireront le cinéma à venir, dont Full Metal Jacket, Platoon, Apocalypse Now et même l’Ennemi Intime. A noter d’ailleurs qu’un jeune bambin Coréen au sein du film, accompagnant les soldats, a le même nom que le petit Chinois d’Indiana Jones et le Temple Maudit, Short Round.
Le film n’est pas nécessairement un chef-d’œuvre de cinéma, et il possède ses défauts, comme parfois un manque de clarté dans sa réalisation (pourtant soignée dans l’ensemble), ou encore des personnages qu’on aimerait un peu plus creusés... Mais on ne peut tout de même qu’être impressionné par le caractère avant-gardiste du film, à tel point que son ultime carton explique que la fin demeure à écrire. Quoi qu’il en soit, un film majeur du cinéma de guerre.