Même si vous n’avez pas vu le film, je suis sûr que vous êtes déjà tombé sur l’affiche absolument dégueulasse du DVD de Jack Frost, soit en vidéo club, soit dans les bacs à soldes où son prix devait avoisiner les 1€. Une affiche kitchissime, semblant avoir été faite par un novice de Photoshop, avec son bonhomme de neige /crâne aux dents acérées absolument pas représentatif de celui du film et qui ne donne clairement pas envie de tenter l’expérience. Et pourtant, bien qu’il soit clairement nul, ce Jack Frost, à ne pas confondre avec celui sorti l’année suivante avec Michael Keaton, est une petite bobine bien fun, certes extrêmement fauchée, mais dans laquelle on sent un réalisateur qui a envie d’amuser son public et qui comble son manque de budget évident par des idées bien trouvées (bien qu’elles aussi bien kitchs). Alors si vous avez envie de vous marrer un petit coup avec des potes, Jack Frost pourrait bien faire la blague.
La mise en boite de ce Jack Frost a été des plus compliquées. Le film a été écrit au départ comme un film d’horreur avec un budget de 30 millions de dollars et qui devait être réalisé par Renny Harlin qui au début des années 90 avait le vent en poupe avec des succès cinéma ou vidéoclubs tels que 58 Minutes pour Vivre ou encore Cliffhanger. Le projet tombe à l’eau, Renny Harlin part sur L’Ile aux Pirates et Jack Frost reste au placard. Le projet revient sur les rails lorsque Prism Entertainment propose de financer le film mais pour un peu moins d’un million de dollars. Le grand écart est énorme, d’autant plus que le scénario original était truffé d’effets visuels qui devraient donc être supprimés pour rentrer dans les clous. Qu’importe, Michael Cooney retravaille son scénario et décide de le réaliser lui-même alors qu’il n’a aucune expérience dans la mise en scène. Lorsque Cooney et les producteurs découvrent le costume de Jack Frost qu’ils allaient devoir utiliser et se rendent compte qu’il ne ferait peur à personne en plus d’être un peu kitch, nouveau changement de plan et ils décident d’en faire une comédie. Sauf qu’entre temps, Prism Entertainment fait faillite quelques semaines avant le tournage. Les banquiers de Prism Video décident malgré tout de financer et de superviser le film en laissant une totale liberté de création, avec pour seule condition qu’il dure 90 minutes et qu’il puisse sortir dans un coffret pour Noël. Véritable luxe pour Michael Cooney et son équipe qui en 1994 tournent le film en 18 jours en faisant ce qu’ils veulent. Mais lorsque les banquiers voient le résultat final, ils trouvent le film tellement ridicule et invendable qu’ils le mettent au placard. Trois ans plus tard, un jeune responsable marketing de chez A-Pix Entertainment voit le film et convainc A-Pix d’acheter le film pour 50000$US. C’est ainsi que Jack Frost sort un peu partout en VHS et DVD à travers le monde et qu’il se vend suffisamment bien pour que sorte 3 ans plus tard une suite (inédite chez nous) intitulée Jack Frost 2 : Revenge of the Mutant Killer Snowman (quel titre !), toujours réalisé par Cooney, son deuxième et dernier film. Mais revenons-en au premier…
Jack Frost est un film à ne pas prendre au sérieux puisqu’il ne se prend pas lui-même au sérieux, conscient qu’avec un tel scénario, il n’y avait pas d’autre moyen que de pondre quelque chose axé sur la déconne. Jugez par vous-même : Un tueur en série est condamné à mort mais le camion qui le transfère a un accident ; son matériel génétique se retrouve accidentellement mélangé à un acide expérimental et ce mélange a une réaction étrange lorsqu’il rentre en contact avec de la neige ; le tueur prend alors la forme d’un bonhomme de neige qui va poursuivre le shérif qui l’a fait mettre sous les barreaux dans une petite ville de campagne ; bien entendu, la moitié de la ville va y passer. Voilà, très con n’est-ce pas ? Et Jack Frost va assumer son délire à fond. Le film n’est jamais subtil et ne recule pas devant une idée à la con. Les dialogues versent parfois dans le grand n’importe quoi, tout du moins dans la VF où le film prend une dimension supplémentaire, et va même dans le meta le temps d’une réplique lorsque le bonhomme de neige s’écrit « Il faut que ce film finisse ». La mise en scène est aux fraises, le costume de bonhomme de neige semble avoir été achetée à la Foir’fouille du coin, les acteurs sont parfois en roue libre, les personnages qu’ils incarnent souvent stupides et le manque de budget se fait sans cesse ressentir au point que les scènes gores sont réduites à leur strict minimum. Mais pourtant on s’amuse car le film s’amuse et fait preuve d’un joli second degré passées les 20 premières minutes. Les mises à mort sont funs, le boogeyman pas avare en punchlines à la con, ça fourmille de petites idées ci et là et bien qu’il date de 1994 dans l’absolu, le film fleure bon le slasher parodique des années 80 (avec entre autres sa poulette qui se dénude rapidement).
Bien que certains l’aient un peu trop vite rangé au rayon nanar, Jack Frost est certes une comédie un peu nulle, mais c’est surtout une bobine assez fun, qui ne se prend pas la tête, et qui veut juste amuser son public. Moi, je me suis marré.
Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-jack-frost-de-michael-cooney-1997/