Librement adapté des écrits de Lee Child sur le héros éponyme, Jack Reacher premier du nom avait connu un succès modeste, suffisamment pour charmer le public mais pas assez pour nous laisser espérer une suite. Pourtant c’est une franchise que semble vouloir explorer Tom Cruise et il revient 4 ans après avec la continuation des aventures de ce personnage taciturne. Christopher McQuarrie, le réalisateur et scénariste du premier opus, cède sa place à Edward Zwick, cinéaste plus inégal mais qui a su prouver par le passé qu’il était très capable pour reprendre le flambeau ; sauf que suite à une bande annonce qui vend le tout comme un film d’action plus proche d’un Mission Impossible que de l’ADN de Jack Reacher, il y avait de quoi s’inquiéter. Au final, on se retrouve face à un film qui cherche le compromis sans trop y parvenir.
L’écriture a très clairement la volonté de rester dans la lignée du film précédent mais elle a aussi l’envie de faire plus en terme de scènes d’actions. Celles-ci sont donc distillées avec moins d’intelligence que dans l’épisode de McQuarrie, qui prenait le temps de bien les préparer et de les poser pour qu’elles n’en soient que plus implacables. Ici, elles sont trop génériques et amenées de façon trop illogique et sans réel tension, ce qui enlève tout l’impact qu’elles devraient avoir. De plus, la caractérisation des personnages se repose bien trop souvent sur la brutalité de ceux-ci, amenant un gimmick redondant qui vient totalement les desservir. Ils ne sont plus que des brutes un peu vides à l’image d’un Jack Reacher qui perd l’aura mystérieuse que le premier opus avait réussi à construire autour de son personnage. Il perd son côté symbolique de justicier solitaire en raison d’une tentative de lui apporter plus de background mais qui va totalement à l’encontre de ce que le personnage représente. Surtout que cette tentative consiste à lui mettre dans les bras une fille illégitime qui fera office de demoiselle en détresse. Le scénario tombe dans tous les poncifs que ce genre de situation peut amener entre le duo principal qui devra jouer au papa et à la maman tandis que l’adolescente rebelle fera preuve de toute sa stupidité pour mettre ce beau monde en danger. Lorsque les principaux enjeux sont provoqués par l’imbécillité d’un personnage, ce n’est jamais bon quant à la qualité de l’écriture.
Mais outre cette idée tout bonnement ridicule, il faut reconnaître qu’on suit cette intrigue sans grand déplaisir. Bien qu’elle soit ronflante, l’histoire gère assez bien son personnage féminin principal, venant vaguement interroger la place de la femme au sein de l’armée, et en lui donnant une place intéressante dans sa dynamique avec Jack Reacher. Le récit pose aussi un contexte géopolitique qui donne un peu de matière à l’ensemble et qui tend par moments vers une critique du système militaire actuel. Cependant, il ne pousse jamais cette bonne idée jusqu’au bout ce qui la rend plaisante mais anodine. Par ailleurs, on reste sur un film qui est pensé pour être à la gloire de son interprète principal mais, étrangement, Tom Cruise devient aussi vide que son personnage. Même s’il assure toujours autant dans les scènes d’actions, on reste avec l’impression qu’il ne s’amuse plus et qu’il n’y croit pas vraiment, perdant ainsi beaucoup de son charisme. C’est Cobie Smulders qui semble vraiment s’éclater ici, elle compose son personnage avec conviction et vient souvent voler la vedette à son collègue masculin. Le duo fonctionne plutôt bien d’ailleurs : les touches d’humour sont efficaces et les deux héros sont pour beaucoup dans l’intérêt qu’on porte au film même s’ils ne sont pas spécialement mis en valeur par la mise en scène d’Edward Zwick. La réalisation est ici très générique, on se croirait par moments dans un épisode version longue d’un procédural du style NCIS. Le tout manque clairement de cinématographie et d’ampleur, aucune scène ne vient sortir du lot au contraire du précédent épisode qui arrivait vraiment à distiller ici et là des moments d’anthologies dont une superbe scène d’intro et une magnifique course poursuite. Le mérite de cette suite est de ne pas vouloir rivaliser avec son aîné et de ne pas essayer de sortir une course poursuite similaire. Mais Jack Reacher : Never Go Back peine à créer le moindre frisson. Le travail de Zwick reste quand même maîtrisé et il offre une lisibilité appréciable sur les scènes de combats qui sont plutôt bien montées mais, il se contente du strict minimum et boucle son film sans le moindre génie.
Jack Reacher: Never Go Back est un film tout juste moyen et qui se montre incroyablement décevant par rapport à son aîné. Le justicier solitaire rentre dans le rang et perd beaucoup de son charisme et de ce qui faisait son intérêt. Toutefois, le duo qu’il forme avec le personnage de Cobie Smulders parvient quand même à divertir, bien aidé par la prestation de l’actrice, mais on reste face à un divertissement générique et anodin. C’est d’autant plus dommage car ces dernières années, Tom Cruise avait fait un sans faute sur ses productions, arrivant toujours à offrir des films de qualité. Ce nouveau Jack Reacher est donc, non seulement, son plus mauvais film de ses 10 dernières années mais aussi, un des plus oubliables de sa carrière. Relativisons en ce disant que le long métrage reste plus que regardable, il n’est jamais véritablement mauvais mais son intrigue cousue de fil blanc et sa mise en scène impersonnelle en font un divertissement dispensable loin du polar élégant et percutant qui sert de base à la franchise.
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