Ce que nous dit Jean-Philippe, par l’organisation tripartite de sa structure, c’est qu’il ne saurait y avoir d’idole sans la vénération d’un fan qui, par la passion qu’il porte à son art et à sa personne, construit du mythique à partir de l’humain le plus similaire qui soit. Le fan apparaît comme le gardien d’un souvenir, mémoire vivante capable de réciter par cœur les textes tant de fois psalmodiés ou hurlés dans la rue ; il porte en lui cette étincelle capable d’embraser le public – à condition qu’elle soit jetée au bon moment –, une étincelle qui l’anime et contribue à faire de lui ou un fidèle ou un magicien qui trouve dans son adoration suffisamment d’énergie et de force pour, à son tour, devenir un mythe que des spectateurs s’arrachent.
Le long métrage interroge de façon pertinente, sans grandiloquence, le pouvoir de résurrection dont dispose le fan ainsi que sa propension à se substituer à son modèle par l’appropriation qu’il se fait des textes et des mélodies. Nul hasard, par conséquent, si les noms de Fabrice Luchini et de Johnny Hallyday surgissent côte à côte lors du générique d’introduction ; que les deux hommes chantent côte à côte lors du générique de clausule. L’artiste et le fan sont côte à côte, le fan reçoit l’artiste et crée du mythe, s’élève en élevant autrui parce qu’il restaure ce lien essentiel qui l’unit à l’infini. En dépit d’une adhésion commune au chanteur un peu trop facile quand ce dernier monte sur la scène et allume le feu, le long métrage de Laurent Tuel offre à Johnny Hallyday une réflexion sur son statut d’icône, et au fan l’occasion de prendre conscience que la grandeur n’est pas l’apanage de l’être cru, mais qu’elle tient aussi et surtout à celui ou celle qui croit.