Le meilleur film de Luc Besson, assurément, est à l'image de son héroïne, furieux et habité. C'est d'abord Milla Jovovich, qui trouve là LE rôle de sa vie, qui impressionne. Elle ne joue pas, elle EST Jeanne d'Arc dans toute sa sincérité mais aussi ses débordements. Vive, flamboyante, impétueuse, impatiente, elle irradie tant par sa beauté que par ce qu'elle fait passer de l'icône, jusqu'à littéralement porter le film sur ses frêles épaules. A ses côtés, le casting international, classieux, est au diapason. Dustin Hoffman, John Malkovich, Faye Dunaway, Vincent Cassel... Tous sont parfaits.
La volonté de Luc Besson de livrer une oeuvre forte est manifeste : il entraîne d'abord son public dans le sillage de sa Jeanne fiévreuse, qui trépigne, le mettant dans la même position que l'héroïne et le faisant adhérer sans réserve au message dont elle se dit investie. Jusque dans sa souffrance, moment où l'on se surprend à retenir son souffle, comme La Hire à son chevet, espérant qu'elle survive à ses blessures. Ressuscitée, elle s'avance vers le fort et implore la reddition anglaise, avant de vitupérer, puis de galvaniser ses troupes, tel un général prêt au combat.
Puis subtilement, s'installe un malaise diffus, par des images, des flashs, alors que la victoire est pourtant au bout de la bataille. Et la vie intérieure de Jeanne nous est livrée, rongée entre ses doutes, sa certitude de faire le bien et ce à quoi elle est destinée, sûre d'être un instrument dans les mains d'un Dieu bienveillant. Elle est enfin mise en face de ses contradictions au cours de son procès. Pas celui de la justice des hommes. Celui instruit par ce qui semble être sa conscience. Et les batailles dans lesquelles elle a été impliquée se révèlent alors dans toute leur cruauté. Jeanne se rend compte qu'elle a fait couler le sang de ses mains, qui ne tenaient pas seulement l'oriflamme, mais aussi l'épée. Elle redevient fragile, enfantine, habitée par l'incertitude des signes à elle révélés comme manifestation du divin et de sa volonté. Au fur et à mesure de son questionnement intérieur, mené sans concession par l'Etranger, l'icône redevient une simple jeune fille, mise en face de ce qu'elle a fait au nom de Dieu. La scène finale n'en est que plus déchirante.
Soutenue par une bande originale magnifique (la bataille des Tourelles !!!) suivant ses tourments intérieurs et des scènes d'action léchées et efficaces, brutales et immersives, Jeanne d'Arc est plus qu'un film sur le personnage éponyme. Il apparaît avant tout comme la dénonciation des dérives du fanatisme quel qu'il soit.
Le chef d'oeuvre de Luc Besson.
Behind_the_Mask, qui boute les détracteurs de Luc Besson (1ère période) hors de France.