John & John
Non mais là, depuis quelques temps, on est rentré dans une nouvelle dimension quand même. J'ai pourtant l'habitude d'être ultra bon public en divertissement et fantasy spatiale John & John, mais...
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le 19 mars 2012
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Déserteur de l’armée sudiste en fuite, John Carter (Taylor Kitsch) se réfugie dans une caverne pour se cacher des indiens qui le poursuivaient. Or, cette caverne est en réalité un passage vers la planète Mars. Celle-ci est peuplée de différentes populations qui s’entredéchirent, le souverain de la ville de Zodanga, Sab Than (Dominic West), ayant déclaré la guerre aux autres peuples de Mars. La princesse d’Hélium, Dejah Thoris (Lynn Collins), découvre en John Carter un homme aux capacités exceptionnelles, la gravité de Mars donnant à Carter une force surhumaine, et cherche à le convaincre de se battre à ses côtés, malgré les réticences de ce dernier. La cause dans laquelle se reconnaîtra enfin John Carter ne se trouvait peut-être pas sur Terre…
Il est dans ce monde un grand nombre de choses incompréhensibles, c’est avéré depuis longtemps. Incompréhensibles, certaines choses le sont pourtant plus que d’autres. Ainsi, de l’insuccès colossal de John Carter, devenu tristement célèbre pour avoir fait perdre 200 millions de dollars aux studios Disney, punis pour avoir osé croire en un de leurs films live originaux (ils ne s’y risqueront plus pendant longtemps, après cela). De fait, si toutes les conditions pour en faire un succès commercial n’étaient apparemment pas réunies, toutes celles pour en faire un chef-d’œuvre l’étaient largement.
La réussite totale du film repose sur les épaules d’un homme en particulier : Andrew Stanton. Ce dernier a été à la meilleure école cinématographique qui puisse se concevoir, puisqu’il sortait alors des studios Pixar, auxquels il a donné deux chefs-d’œuvre : les géniaux Monde de Nemo et Wall-e. C’est donc tout naturellement que, pour son passage au cinéma en images réelles, il accouche d’une œuvre tout-à-fait unique en son genre. S’appuyant sur la saga littéraire d’Edgar Rice Burroughs (l’auteur de Tarzan), celle-là même dans laquelle ont abondamment puisé George Lucas et James Cameron pour leurs grandes sagas respectives, John Carter se dégage pourtant très rapidement des Star Wars et Avatar qu’on lui a bêtement reproché de copier, alors même que son support d’adaptation leur était bien antérieur.
Il faut dire que l’équipe technique assemblée par Andrew Stanton se révèle proprement exceptionnelle. L’homme qui a peut-être le plus apposé son empreinte sur le film de Stanton est sans nul doute le chef décorateur Nathan Crowley, qu’on a vu à l’œuvre sur tous les films de Christopher Nolan depuis Memento. Le choix de ses décors, dont beaucoup de décors naturels ensuite complétés par des effets numériques proprement invisibles, donne à John Carter son identité puissante et unique en son genre, tant il parvient à entremêler les influences avec une originalité sans bornes.
Magnifiés par la photographie somptueuse de Dan Mindel (vu à l’œuvre chez J.J. Abrams), elle-même dynamisée par un montage millimétré d’Eric Zumbrunnen, un quasi-inconnu pourtant très talentueux, ces décors constituent un écrin de premier choix pour y mettre en œuvre le spectacle total auquel Andrew Stanton nous convie.
Un spectacle bel et bien total, aux influences multiples, qui en font un film-somme particulièrement complet : du péplum au space opera, en passant par le western, la fresque médiévale, la romance ou même le film policier, le récit de John Carter ose saisir à bras le corps un héritage aussi imposant que complexe pour le restituer dans son essence la plus pure au travers de ce qui s’avère un modèle parfait de pastiche, dans l’acception la plus honorable du terme.
Cet hommage s’étend même jusqu’à la musique du film, la bande-originale de Michael Giacchino, de ses sauvages percussions tribales à ses envolées lyriques de cuivres éclatants à faire pâlir John Williams lui-même de jalousie, est sans nul doute la meilleure que le compositeur, pourtant particulièrement prolifique et riche dans ses compositions, ait écrite à ce jour. Si on ajoute à cela une direction d’acteur parfaite en tous points et un épilogue d’un génie narratif consommé, on ne voit plus guère ce qu’on pourrait reprocher à John Carter.
On pourra même – paradoxe ultime – trouver sa consolation dans l’insuccès du film. Car si son ambition alliée à un inconcevable mépris de la part d’un public décérébré ont scellé sa tombe, enterrant par la même occasion tout espoir de suite, John Carter restera un one-shot, et ainsi, rien ne viendra jamais plus affadir la saveur de ce qui restera éternellement dans l’histoire du cinéma comme un des meilleurs space opera jamais réalisés.
Et si le public préfère se rassasier jusqu’à plus faim de remakes réchauffés et sans inventivité des grands classiques Disney, personne ne pourra conserver sa crédibilité en accusant les studios Disney d’avoir entraîné la mort de l’originalité et par conséquent, du cinéma de divertissement. Car dans l’histoire, autant que dans l’Histoire, le vrai coupable, c’est le public.
*Will Turner, Pirates des Caraïbes
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le 29 août 2016
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