Dans le marasme du film d'action américain des années 2010 la sortie, en 2014, de John Wick était une bonne surprise et le film a vite gagné le statut de bouée de sauvetage pour les amateurs de brutalité régressive (alors que bon, les gars, Dredd est sorti en 2012). Mais John Wick était blindé de défauts parfois assez irritants. En réalité le premier film n'était qu'un brouillon, c'est en tout cas ce que nous confirme le retour pétaradant de John Wick aux affaires dans John Wick 2. Le réalisateur Chad Stahelski reprend tous les éléments qui ont marché dans le premier en les améliorant et il corrige au passage les égarement. Le même esprit, pratiquement le même film en réalité, mais en mieux.


Le premier épisode bénéficiait d'un point de départ aussi con que simple : un chien à venger. C'était assumé mais difficile cependant de tenir vraiment les personnages et le film là dessus. Il se développait alors une étrange mythologie autour d'une confrérie masquée du crime avec ses rituels, ses règles. Un aspect qui était finalement assez frustrant car le premier John Wick n'en faisait pas grand chose alors que c'était là son plus grand gage d'originalité. Dans John Wick 2 on ne tue plus de chien mais on embrasse enfin cette mythologie pour l'exploiter comme il se doit. Tout ceci prend enfin corps sans lourdeur, le récit reste d'une grande simplicité (et heureusement), on a simplement enfin la sensation que cet univers parallèle existe réellement. En centrant l'intrigue autour des mécanismes internes de cette société secrète le film dispose donc d'un parfait prétexte pour offrir à John Wick des adversaires à sa hauteur, en plus de la centaine de sbires anonymes ne servant que de cibles ambulantes, permettant de faire monter d'un cran les enjeux de nombreuses séquences. Les personnages secondaires sont donc plus intéressants sans être envahissants et si l'approche reste toujours très frontale John Wick 2 s'autorise à plus d'humour que dans le premier opus. Dans les dialogues d'une part mais aussi dans les situations, comme cet échange de coups de feu au silencieux au milieu de la foule du métro qui flirte volontiers avec le burlesque.


Mais si John Wick avait marqué les esprits c'était avec des scènes d'action bien violentes et réglées au poil de cul, portées par un Keanu Reeves impressionnant dans le maniement du "Gun-Fu". Un véritable festival de headshots. Mais passé la surprise des deux premieres scènes le film se contentait d'un copié-collé et l'ensemble devenait particulièrement lassant : les mêmes situations, le même crescendo, les mêmes headshots. John Wick 2 prend le problème à bras le corps et injecte beaucoup plus de diversité dans ses scènes d'action, rien que l'introduction où les comptes se règlent à grand coup de pare-chocs dans la gueule apporte une fraîcheur salvatrice. Mais ça ne s'arrête pas là et chaque scène d'action a sa propre personnalité, sa mécanique interne et elles sont toutes impressionnantes. La violence a aussi était poussé un cran au dessus, vous ne regarderez plus jamais un crayon à papier de la même façon. Un régal. Le découpage est très clair, la caméra privilégie les plans moyens ou large pour apprécier un travail chorégraphique réjouissant, les mouvements de l'appareil servent l'impact de l'action. Pas, ou peu, de tricherie ici avec un montage qui laisse le temps aux plans d'exister et aux coups d'être portés. Keanu Reeves est encore une fois vraiment incroyable : la concentration, la maîtrise des gestes... l'acteur est une véritable machine à tuer. D'ailleurs il existe des vidéos de son entrainement pour le film, on comprend que le père Keanu (à 52 ans tout de même) déconne zéro dans le maniement des armes à feu et des techniques de close combat.... et à l'écran ça se voit, ça se ressent et ça apporte aux fusillades/bastons/poursuites une intensité folle. Evidemment on n'est pas encore au niveau des performances, à mi chemin entre le suicidaire et la maltraitance, d'un The Raid mais on s'en rapproche et on ne pensait pas pouvoir dire ça d'une production américaine récente. Le dernier point où John Wick 2 prend une autre dimension par rapport au premier volet c'est dans la mise en scène. Il y a des idées souvent, un peu partout et ça fonctionne parfaitement bien. Le clou du spectacle est évidemment cette étonnante séquence dans une galerie artistique dont les murs sont recouverts de miroirs. Au delà du gimmick visuel certains plans et certaines idées sont dignes de Robert Zemeckis. Il est intéressant maintenant de voir ce que fera David Leitch, l'autre moitié de la paire de réalisateur du premier John Wick, avec son Atomic Blonde prévu pour l'été 2017.


La définition même d'une bonne surprise est d'être satisfait alors qu'on n'attendait rien, voilà ce que nous offre John Wick 2. Plus varié, plus attachant, plus fou, plus virtuose et aussi plus bourrin que le premier opus : John Wick 2 est une suite parfaite en plus d'être un excellent film d'action.

Vnr-Herzog
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le 2 juin 2017

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