Le premier a signé la naissance d’un tout nouveau genre de films d’action, le deuxième en a été la confirmation. Il était bien évident que ce troisième volet allait bien susciter la curiosité d’un bon grand nombre de cinéphiles, surtout après avoir vu comment le second film se termine. Excommunié, traqué par des assassins invulnérables, sa tête mise à prix, John Wick est dans de beaux draps. La production commence direct là où le second a pris fin et on peut dire que c’est bien engagé. Le long-métrage s’ouvre sur une séquence ineffablement oppressante, avec un John Wick courant comme un dératé, consultant sa montre maintes fois et sillonnant les rues d’un New-York plongé dans une semi-obscurité et pluvieux.
Le cahier des charges devait être certainement lourd à le remplir mais en tout cas, il a bien été respecté. Ce troisième opus dépasse pratiquement toutes nos attentes, on est face à un enrichissement effroyable et ambitieux d’un univers d’assassins plus ou moins acharnés, géré sous une procédure stricte, sévère et mise en place par une organisation secrète et inflexible. Cette reproduction est montée sous un seul principe scénaristique, les conséquences suite au non-respect des règles.
Tout le film en traite, avec minutie et par une logique impeccable, sous plusieurs aspects événementiels. Le scénario n’est sans doute pas le plus brillant des scenarii des films d’action de nos jours mais avec un professionnel-cascadeur aux commandes comme Chad Stahelski, on était sûr que le visuel allait être ébouriffant à voir. L’expertise cinématographique de ce dernier va bien à l’au-delà de celui que n’importe quel metteur en scène l’aurait acquis lors de nombreuses années de réalisations de films d’action. C’est une nouvelle ère de spectacle qui s'annonce, une expérience hors-du-commun qu'on nous propose, où Keanu Keeves, une star chevronnée des films d’action, se surpasse physiquement et moralement.
Je n’arrive pas à croire comment il arrive à dégager une telle sauvagerie dans les coups, comment il défonce la gueule des truands s’opposant à lui sans la moindre limite et comment il livre une personnalité de tueur inaccessible. Il est la pièce-maîtresse des scènes d’action, tout est centré sur ce bagarreur urbain increvable, avec une caméra qui le suit aisément et intelligemment, créant même un effet de répétition sans rendre forcément les attaques répétitives. L'impact ressenti à chaque coup lancé nous cloue considérablement sur nos sièges, on atteint presque un niveau de violence égal à celui des films The Raid, mais avec de l’esthétique et de la beauté.
La seule chose qui est vraiment improbable en lui, c’est qu'il garde la même forme physique après tout ce qu'il encaisse. Sans voir le moindre signe de fatigue après chaque combat chez John, on finit par ne plus croire à la crédibilité de son personnage. On a fait de lui un surhomme et ce détail ne se voyait pas du tout dans les deux premiers. En plus, je trouve légèrement abusé l’emploi massif des Asiatiques et des arts martiaux. C’est sûr que ces pratiquants de combat extrêmement agiles se défoulent au maximum pour nous garantir d’un spectacle visuel fabuleux mais plus diversité (des baraqués, des femmes, des anciens soldats) n’aurait jamais été de trop. Néanmoins, ce qui est intéressant dans le long-métrage, c’est l’exploitation de l’environnement.
On goûte presque tout ce qui est urbain, en passant par une sorte d'antiquaire d'armes historiques, dans une écurie et on nous offre en bonus des magnifiques course-poursuite à cheval ou à moto, pour plus d’innovation et de fraîcheur. De plus, les scènes d'action sont très réalistes car on voit bien John recharger plusieurs fois ses armes (Ce qui est rarement vu dans un film d'action, quand le personnage tue une bonne trentaine d'assaillants sans recharger une seule fois son arme). Au casting, on compte quelques belles surprises.
On a un Mark Dacascos qui incarne enfin un vrai rôle digne de ses talents d’arts martiaux. Il est limite un peu sous-exploité mais son interprétation est très jouissive et sobre, son combat avec Keanu Reeves est tout simplement démentiel, bien que je ne vois pas l'intérêt du coup d’invisibilité en mode ninja. Parmi eux, on retrouve des habitués incarnant leurs personnages avec beaucoup d’élégance comme Lance Reddick ou Ian McShane, dans leurs rôles respectifs d’hôtes d’accueil ou de directeur d’hôtel. Anjelica Huston anime une présence assez majestueuse en tant que directrice d’un centre de formation de tueurs mais la présence féminine qui m’a le plus impressionné est sans doute celle venant d'Halle Berry. Celle-ci se glisse dans la peau d'une tueuse aussi redoutable que John Wick. Sa séquence d’action dans un coin spacieux à Casablanca est époustouflante à voir, elle est d’une fougue et d’une dextérité phénoménale, on voit bien qu’elle a subi un entraînement draconien.
Je trouve regrettable qu’elle ne soit pas plus présente, elle aurait fait une superbe partenaire de combat aux côtés de Keanu Reeves, surtout avec ses deux terribles chiens de garde l’obéissant au doigt et à l’œil. Petite anecdote au passage, c'est l'actrice elle-même qui a dressé les chiens et pendant le tournage, les toutous attendaient ses ordres pour exécuter les cascades les plus improbables de chiens de toute l'histoire du cinéma. Ce troisième opus regorge beaucoup de références des deux premiers, très bien placés, très bien intégrés dans le scénario et de manière savoureux, il en y a même une qui rends hommage aux western de Sergio Leone mais celle-ci me semble bien inutile finalement, surtout après ce que Keanu Reeves fait de son revolver. Mise à part des vilains défauts, la production est une dose d'adrénaline assumée et incontournable, révolutionnant même le film d’action, avec le dernier Mission Impossible sorti l’année dernière. 8/10
Dis-moi John Wick, es-tu en rogne ?