Internet est un endroit fabuleux, quand on n'est pas d'accord avec une opinion, il suffit de la supprimer, pratique - mort aux cons comme disait Renaud. Je critique, je calomnie (quel gros mot !), je suis un salaud ! Vive les gentils, soyons tous d'accord et le monde ira mieux, la violence dans un texte ne devrait pas exister.
J'espère seulement que les auteurs qu'il a critiqué le juge aussi calomniateur que moi et qu'ils peuvent aussi supprimer ses critiques, comme lui.
Perle originale :
https://www.senscritique.com/film/Joker/critique/206503859
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@-Piero- Je vous remercie de ne pas me saluer, et j'accepte avec plaisir vos non salutations ; je vais tout de même vous répondre.
"Mépris universel" vous dites ? Oui, effectivement, pour cette pellicule et toutes celles dans son genre. Le genre de film qui se perd dans les travers dont ils veulent rendre compte.
"Je ne vais pratiquement plus au cinéma et sais au moins pour quelles raisons : si ça n'était dû qu'à la médiocrité de ce qui sort le plus souvent (débilité du scénario, laideur absolue de l'image numérique, malhonnêteté du message qui, sous couvert de neutralité, cherche à imposer une vision idéologique du monde qui ne me convient pas, c'est peu de le dire), s'il ne s'agissait que du bourrage de crâne habituel, ce ne serait pas bien grave. Il existe tant de bons livres, qui suffisent amplement à mon bonheur."
Libre à vous d'aller voir des films mauvais ; mais quel manque de logique que de renier tout un moyen d'expression - le cinéma - car vous n'arrivez pas à trouver celui qui vous correspond. Palme d'or du non sens pour l'expression "cherche à imposer une vision idéologique du monde qui ne me convient pas", n'est pas ce que font tous les arts ? de la Philosophie à la peinture en passant par la musique, tous les arts transportent le point de vue d'un artiste, d'un être humain.
"Le cinéma contemporain ne se contente pas d'être le plus souvent nul : il est "psychotisant", "schizophrénisant", si l'on me permet ces affreux néologismes. Le procédé est simple, mis au point depuis longtemps par les publicitaires, et beaucoup plus efficace que la propagande directement politique : il convient de se situer dans l'indignation, la dénonciation, et ensuite de filmer pendant des heures-les films contemporains sont souvent interminables-les turpitudes que l'on prétend dénoncer-nazisme, viol, pédophilie, homophobie, connardophobie, que sais-je encore ?"
Répétition du premier paragraphe ; on constate néanmoins ici avec plaisir un léger penchant pour la paranoïa, le complot... Pensez-vous aussi que les francs maçon dirigent le monde ? Ces méchants "publicitaires", ah ! Encore une fois, aucun livre ne se livre à ce genre de bassesse, il convient de rappeler qu'il n'existe pas de littérature de droite ou de gauche - les écrivains sont des anges, ils transcendent tous ces clivages, c'est bien connu.
"Ou, pour le dire comme les psychanalystes, l'art contemporain attise un conflit sans résolution entre un Ça et un Surmoi aussi tyranniques l'un que l'autre. L'art contemporain fait l'impasse sur la catharsis aristotélicienne, et c'est un drame. L'impasse sur la conscience et la volonté aussi."
Effectivement, ce paragraphe ne trompe pas : vous lisez des livres, vous êtes cultivé ; je serai ravi d'en apprendre d'avantage sur cette "catharsis aristotélicienne".
"Mais trêve de branlette : Joker est une oeuvre, un chef-d'oeuvre, populaire, dans lequel tout un chacun pourra trouver son compte, et surtout, même s'il ne ressort pas comme moi bouleversé de la projection, trouver matière à réflexion."
Trêve de branlette, il était temps - la suite promet donc d'être intéressante :).
La phrase suivante vous donne totalement raison (à vous comme à moi d'ailleurs, même si vous ne vous en rendez visiblement pas compte) : "dans lequel tout un chacun pourra trouver son compte", ce film est bel est bien un flou artistique, un grand fourre-tout, un joli horoscope de 2 heures.
"J'ai hésité à écrire une critique à chaud, depuis la poubelle où je réside en tant que vieux réac rance, abject et nauséabond, à en croire certains charmants éclaireurs progressistes et charitables du site."
Bon... je suis contre autoflagellation publique, mais c'est comme vous voulez.
"Quand je dis que le film de Todd Phillips m'a bouleversé, c'est pas une figure de style : ce matin, je sais plus trop ce que je pense, ni même qui je suis (mais ça c'est pas une nouveauté), alors je vais vous livrer des impressions en vrac :"
C'est aussi visiblement le vrac dans vos pensées. Ce film vous a donc vraiment touché - génial ! - ; il ne pouvait y avoir qu'un grand film pour toucher -Piero-.
"-Joaquin Phoenix incarne de manière ahurissante un personnage impossible à incarner : un cœur pur qui devient un meurtrier parce qu'il refuse le mépris et l'humiliation que tentent de lui imposer des connards. Un Juste qui choisit de vivre debout, de cesser de se faire piétiner par des salopards."
La vieille rengaine sur la folie et la pureté, rien de nouveau. Ouvrons nos asiles : nous sommes les fous, pas eux.
"-Joaquin Phoenix possède une "vie intérieure", le truc dont l'immense Georges Bernanos disait il y a des décennies déjà que le système moderne faisait tout pour l'interdire."
C'est vrai, d'ailleurs pour ne pas "éveiller" trop les consciences, suite à la diffusion de ce film choc - auquel personne n'était encore prêt, tant les vérités lourdes qu'il véhicule sont dures à porter -, les dirigeants (les méchants) ont immédiatement ordonnés la fermeture des musées, des galerie d'art, des centres culturels, des écoles d'art plastique, les riches sont même priés de brûler leur Picasso ; il faut stopper l’hémorragie coûte que coûte.
"-le film ne contient aucun message politique : juste un constat, que partagerait par exemple un Christopher Lasch, sur l'état de décomposition avancé de nos sociétés, "occidentales" ou pas, sur la lutte de tous contre tous. Gotham City, c'est sans doute New York, mais ça peut être n'importe quelle grande métropole mondialisée n'importe où dans le monde."
Choisir de mettre en lumière un problème particulier, très spécifique, que certains tairaient bien n'est absolument pas politique. J'espère que vous vous abstenez de voter.
"-le film démonte le système du mensonge médiatique de façon magistrale : il avait raison, le Guitou Debord, "tout ce qui était vécu directement s'est éloigné dans une représentation"."
C'est vrai, je n'avais jamais vu le mensonge médiatique traîné aussi fort et aussi violemment dans la boue. Je vous invite tout de même à visionner "They Live" (1988) de John Carpenter, petit complément complotiste que vous risquez fort d'apprécier (futur 10-coeur ?). Dans le même genre, permettez vous de citer aussi un auteur (qui m'est cher) et dont la pensée n'éclaire en rien la critique. Comme disait ce bon vieux M. Merleau-Ponty dans La Prose du monde : "Il nous faut considérer la parole avant qu’elle soit prononcée, sur le fond du silence qui la précède, qui ne cesse pas de l’accompagner, et sans lequel elle ne dirait rien ; davantage, il nous faut être sensible à ces fils de silence dont le tissu de la parole est entremêlé."
"-la catharsis fonctionne à plein dans ce chef-d'oeuvre : tenez, moi qui avais envie de buter ma belle-doche, ainsi que quelques animateurs télé et hommes politiques divers, je ne le ferai finalement pas : Phoenix toujours renaissant de ses cendres l'a fait pour moi, il oeuvre pour la paix sociale, ce mec."
Robin des bois, littéralement.
"-le monde est dominé par la psychiatrie et la psychologie à deux balles. La psychologue sensée "écouter" le Joker est en fait une auxiliaire de police qui non seulement n'écoute ni n'entend rien, mais n'a même pas honte de son rôle de délatrice, et, du reste, comment pourrait-on lui en vouloir vraiment, à elle qui pense agir au nom du Bien."
On continue sur la lancé bien binaire des "Gentils et des Méchants", on ne peut pas vous en vouloir, le film vous conforte dans cette idée ; il vous montre exactement ce que vous attendez (une sorte de contre bien pensance edgy ?), les neurones de la critique ne sont pas activé, c'est parfait.
"-généralement je m'endors au bout d'un quart d'heure au cinéma : là, le montage est tellement serré, pas un temps mort, le jeu de Phoenix est si prenant qu'il parvient à tenir éveillé un vieux débris au bord de la sénilité."
Faites vous une faveur ne regardez aucun film d'Andreï Tarkovski.
"-l'Eglise chrétienne est totalement absente dans le film (comme dans la réalité depuis qu'elle est dirigée par un type fasciné par tout ce qui est le plus radicalement anti-chrétien dans le monde. Idiotie, masochisme, perversité, les trois à la fois ? L'avenir nous le dira), le message chrétien de charité et de miséricorde est pourtant bien présent, par exemple dans la scène où le Joker non seulement ne tue pas, mais embrasse sur le front pour le remercier de sa gentillesse le petit nain, pardon la personne de petite taille, qui fut son compagnon d'infortune dans son boulot de clown triste."
Analyse complètement fausse, on note avec sourire le retour du champs lexical du complot. Encore une fois, il n'est jamais question de complot dans le film, vous voyez ce qui vous arrange, bel gymnastique mentale. A quelle "gentillesse" faites vous référence ?
On ne parle pas plus de la condition ouvrière en France des années 20. Mais soyons sérieux, soyons profond - comme ce chef d'oeuvre nous l'invite à l'être - (entre deux rires forcés, quelques cadrages champ/contre-champs d'une montée/descente d'escaliers hautement révélatrice - reliez d'ailleurs la prise de vue à l'état psychologique, la vision du monde, de son positionnement par rapport à celui-ci, dans laquelle se trouve le Joker au moment où elle sont prises, surprise garantie, quelle génie), le réalisateur aurait-il en fait voulu illustrer la célèbre formule du Friedrich Nietzsche "Dieu est mort" ? se jetant ainsi, sans aucune assurance, dans le dangereux et périlleux cocktail du film d'auteur pour masses, comme vous dites, qu'il loupe complètement.
"Voilà ce qui me vient ce matin, après cette expérience mémorable. Pas le dixième de ce que je ressens, mais je compte sur vous, éclaireurs d'accord ou pas avec moi, pour me laisser des commentaires et m'éclaircir un peu les idées."
Vous l'aurez compris, je fais partis de ceux qui ne sont pas d'accord.
Bien à vous.
Benjamin