Au plus près
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le 19 avr. 2018
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J'ai vu cette adaptation du livre de Bernanos Journal d'un curé de campagne à peu près un an après avoir fini le roman, non pas sans émotion. Le film m'a d'abord bêtement permis de saisir complètement la narration que ma lecture étirée avait brouillée. On peut dire que le film est un concentré des moments forts du livre, ce qui donne donc un film chargé pour le plus grand plaisir des spectateurs, moi compris.
Le cinéma semble être plus obligé que la littérature à "faire avancer" l'histoire et donc le film passe très rapidement quand on a lu le livre. Mais pourtant chaque scène est si pleine qu'on a envie de s'y arrêter, de la repasser, d'y réfléchir. Ce petit curé, de plus en plus malade, se prend la vie en pleine face. On le voit douter de sa foi, on le voit faible, on l'entend faible. Tout cela en continuant les obligations de sa fonction, bien qu'il n'y ait pas grand monde à sa messe. Monsieur le comté (il me semble que c'est lui, mais peu importe si je me trompe) lui dit qu'il s'agite trop, qu'il doit laisser les habitants venir à lui et pas l'inverse, le curé répond que ces choses là lui tiennent à cœur. Et oui, l’Église étant en fin de vie, nous avons représenté ici dans ce film un curé à qui la santé au sens large "tient à cœur".
Ce curé, prêt à endurer les souffrances et le mal des hommes, qui semble être tombé du ciel, tient un journal où il y décrit ses journées. Si vous frémissez à la lecture de cette phrase, il faut absolument voir le film et je recommande encore plus chaudement la lecture du livre, qui a décuplé ma jouissance lors du visionnage.
Bresson utilise la voix off pour la lecture du journal du curé. La voix off est parfois (souvent ?) une solution de facilité au cinéma. Au lieu de montrer par l'image, ce qui est quand même la caractéristique principale du cinéma on fait simplement dire au spectateur ce qu'on veut qu'il sache. Mais ici, la récurrence de la voix off, presque toujours accompagnée d'un plan sur la page du journal du curé, n'est pas dérangeante, au contraire. L'écriture-lecture du journal permet un accès à une intimité d'une grande richesse, largement suffisante à en faire un film et suffisante à en écrire un livre. Les phrases de Bernanos sont belles et ouvrent un espace à chaque fois. Il faut dire aussi qu'elles épousent parfaitement le corps et particulièrement le visage du curé. L'acteur est très bien choisi, il est frêle et tenace, beau et capable d'être tordu par émotion.
Je ne connais pas bien la méthode bressonnienne (Notes sur le cinématographe est dans ma bibliothèque, je finirai bien par le manger), ni vu tous les films de Bresson bien que ça avance, mais de ce que je sais, elle rend les acteurs puissant car ils ont une façon d'être à l'image qui est à la limite parfaite entre l'émotion (surtout le personnage principal) et l'inexpressivité, qui laisse au spectateur l'occasion de projeter une plus grande variété d'émotions.
(J'ai laissé traîner ma critique, je la publie donc moins complète qu'elle aurait pu être)
Créée
le 26 janv. 2025
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