Journal de septembre
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Documentaire de Eric Pauwels (2019)

Il faudrait un endroit où l'on puisse se soulager de la mort

[Mouchoir #65]


Quand le premier film que je vois d'un·e cinéaste me plaît énormément, je suis réticent à explorer le reste. Je suis tétanisé à l'idée qu'il s'agisse d'un coup d'éclat, d'un coup de chance, d'une rencontre fortuite au bon moment. Bref, je retarde la vision des autres films.


Finalement, à mes yeux, Eric Pauwels est bel et bien un maître à penser, rentre dans ce panthéon. Ça tient à peu, mais le peu est révélateur. Je filme pas mal avec de petites machines, camescope, portable, etc. Mon œil cadre d'une certaine façon, pas d'une autre. Et ce qui me fascine dans ces films, c'est que je retrouve des objets, des choses, que j'ai filmées parfois à l'identique. L'affiliation hasardeuse est criante et a quelque chose de magique. L'impression de retrouver un membre de sa famille lointain, où l'on ne partage pas du sang en commun mais des images.


J'ai rarement autant ressenti au cinéma ce sentiment de liberté, d'ouverture des possibilités, sans que cela ne s'apparente à un amalgame foutraque d'images et de sons. Il s'y joue une cohérence secrète où le balayement du regard est roi, où l'imagination peut écrire tous les romans qui lui viennent, où le mois de septembre ne s'arrête pas un 30. Du reste, je crois avoir trouvé ici la citation qui englobe mon amour pour ce cinéma et en fait à mes yeux quelque chose de précieux, qu'on voudrait garder près de soi, dans une toute petite boite au fond de sa poche, pour les moments de doute, d'angoisse et de peur : « Il faudrait un endroit où l'on puisse se soulager de la mort. » Pauwels n'aura de cesse de l'inventer.

SPilgrim
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le 2 juin 2024

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