Morceaux de vie
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Reprocher à ce film son nombrilisme a quelque chose d’un peu malhonnête tant son titre annonçait la couleur avec la plus grande franchise. Nanni Moretti se filme, parle de lui en voix off et déambule dans Rome sur sa Vespa. C’est souvent assez beau, porté par une B.O. éclectique et de haute volée, et assaisonné de petites séquences insolites qui parviennent à renouveler l’attention, comme la prise à parti du chauffeur au feu rouge, qui semble clairement représenter le spectateur que monopolise le cinéaste, ou le caméo de Jennifer Beals, objet de toutes les convoitises.
L’intérêt du film ne se cantonne pas à cette audace de n’avoir rien à raconter, sinon à livrer, apparemment sans fil conducteur, ses pensées et ses errances. C’est aussi dans cette restitution et dans l’illusion de vérité que se jouent les enjeux de cette entreprise originale : Moretti s’amuse avec nonchalance, et travaille à gommer tout signe d’artificialité dans sa tonalité, cherchant presque l’illusion d’une caméra cachée. Il ne s’agit pas de faire un faux documentaire, mais de permettre à la poésie une irruption plus prégnante, qu’elle soit d’ordre comique ou contemplative : danser dans une boulangerie, interroger des touristes américains sur la suite d’Amour, Gloire & Beauté, ou interrompre sa logorrhée au profit de virées musicales.
Moretti n’épargne personne, et surtout pas lui-même : s’il se permet une vision satirique de la société italienne, notamment dans sa tournée des îles à la recherche d’un havre de travail, il écorche aussi bien le règne de l’enfant roi, la bêtise de la hype que la vanité des intellectuels.
Le projet est original, le ton rafraichissant. Reconnaissons tout de même qu’on sait gré au réalisateur de ne pas excéder les 100 minutes, particulièrement dans la dernière partie consacrée à ses problèmes de santé, règlement de compte assez pénible et sans intérêt, nous laissant sur une note d’ennui et d’indifférence qui gâche quelque peu le plaisir initial qu’on avait pu ressentir.
(6.5/10)
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le 6 oct. 2015
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