Jungle met en scène la confrontation entre un groupe d’individus isolés et la puissance mythique de la jungle bolivienne, traitée ici comme un personnage à part entière, un corps capable d’absorber les autres corps plus petits à l’instar des sables mouvants qui manquent d’avaler Yossi Ghinsberg. Il est donc cohérent que l’expédition physique des trois amis se double d’une aventure métaphysique et religieuse qui conduira un jeune homme en conflit avec sa famille à retrouver la foi.
Le parcours de Yossi s’apparente à un chemin de croix, son corps maigrit peu à peu pour ne laisser voir qu’un Christ noirci par la terre qui réclame par instants des châtiments, comme ces fourmis rouges dont il se couvre le torse. Allongé la nuit, il communie avec la Lune, ce phare qui illumine l’obscurité et paraît cristalliser tous les espoirs. L’homme, dans Jungle, est raccordé à sa fragilité première, à sa force première également, il éprouve ses limites qu’il dépasse par la conviction d’une présence transcendante, un quelque chose de supérieur qui le pousse à avancer. C’est d’abord la drogue, puis les visions hallucinées, les insectes. Substituts d’un Dieu qu’il cherche désespérément.
Sorti la même année que The Lost city of Z, le film de Greg McLean témoigne d’une fascination commune pour la jungle comme conservatoire sauvage d’une mythologie atemporelle, un espace qui nous fait choquer le réel dans ce qu’il a de plus surnaturel et de mystérieux. Tout en étant un excellent survival, parfaitement rythmé et efficacement mis en scène. Jungle est une œuvre luxuriante, bien plus profonde qu’elle n'en a l'air.