Le destin de l'écran vert
Vous voulez que je vous dise ? Jupiter ne mérite même pas sa place dans les arcanes du blockbuster.
Parce qu’en matière de clichés et de recettes à faire figurer à tout prix, en faire la liste et les dénoncer devient en soi un poncif.
J’ai vu ce film parce qu’il est réalisé par les Wacho, pour qui j’ai encore une certaine admiration. Ce sont de véritables cinéastes, qui ont une patte indéniable et un sens visuel singulier. Après la roue libre Speedracer, finalement très audacieux dans son indépendance donnée à la cinétique émotionnelle, on pouvait attendre quelque chose de ce nouvel opus.
Et c’est le cas pour certaines séquences. Le film est clairement écrit pour accoucher de ces scènes qui défient les lois de la gravité, entre surf sur bottes et engins futuristes, notamment dans un Chicago nocturne et malmené. La maitrise est indéniable, la 3D parfois pertinente, même si les deux larrons ont tendance à céder à cette course au montage frénétique qui finit par brouiller la syntaxe. Par moments, clairement, on ne comprend plus grand-chose sur qui fait quoi et qui tire sur qui.
Mais il faut, pour mériter ces passages, se farcir un océan de médiocrité qui, lorsqu’on fait le bilan, l’emporte largement sur le reste. Humour des répliques low cost, fatras mystico idéologique, recettes éculées (quand même, la famille prise en otage, il fallait oser dans film qui prétend vous vendre « Le destin de l’univers »), rien ne distingue ce film de toute la production des 30 dernières années. Ni l’usine planète qui se détruit sur le final, ni l’histoire d’amour.
Digest nauséeux d’une kyrielle de références, Jupiter joue sur tous les tableaux. On ne sait si les Wacho cherchent à affirmer leur cinéphilie (Soleil Vert, Brazil, jusque dans l’apparition assez pathétique de Gilliam, Star Wars, Star Trek, Dune, Le 5ème élément, Ender,…) ou s’ils pompent simplement sans vergogne.
Mais de cette débauche de costumes, de mouvements et de fonds verts illustrés avec une bonne volonté et un savoir-faire certains, rien ne surgit. Ni émotion, ni intérêt, ni fascination.
Reste un certain malaise, celui de voir se déployer tant de coquilles, colorées, chères et bruyantes, autour d’un vide si tenace.