Ceci est mon premier constat à la sortie de la séance de cinéma. Et cela fonctionne aussi bien au sens propre (le parc d'origine est détruit) qu'au sens figuré (tout ce que j'aimais dans la trilogie originale a disparu). A croire que la franchise ne s'adresse plus au même type de public. Cette chose imaginée par Colin Trevorrow est un grand doigt d'honneur fait aux fans. On a l'impression qu'il n'y a que l'aspect mercantile qui importe. J'ai du mal à croire que Steven Spielberg cautionne ce qui est montré. Il faut croire qu'il se fout de la cohérence d'ensemble.
A quoi bon avoir un scénario crédible ? Il serait plus facile de récréer les dinosaures pour les revendre ensuite mais il est préférable d'aller les chercher sur Isla Nublar... L'expédition doit être très coûteuse, dangereuse,... L'idée même du film est déjà bancale. En plus, plein d'astuces sont trouvées pour faire avancer le vide scénaristique. Le Vélociraptor meurt ? On va lui mettre du sang de TRex. Comment faire échapper le nouvel hybride de sa cage ? On va demander à un bad guy de l'ouvrir afin qu'il lui prenne ... ses dents. Et c'est souvent comme ça : des absurdités font avancer le scénario. C'est triste à dire mais on est du niveau de Rampage sorti quelques semaines plus tôt.
Un des intérêts des Jurassic Park était de montrer des dinosaures en image, crédibles anatomiquement et au niveau de l'instinct. Les carnivores n'attaquaient pas les humains pour rien. Dans JWFK, les dinosaures se sauvent d'un danger imminent mais prennent le temps de s'arrêter pour un casse-croûte. Quand l'un des personnages est sur le point d'être attaqué, le TRex arrive, le "sauve" et repart ni vu ni connu. Une scène similaire va se répéter une deuxième fois ! Je cherche toujours la crédibilité de la scène et à trouver une logique. Les scénaristes ont la volonté d'icôniser le TRex mais cela retire tout danger vis à vis de la bête. C'est absurde et ce n'est qu'un prétexte pour faire avancer l'histoire. Jurassic Park n'a jamais eu le volonté d'ériger en héros des dinosaures, ni des humains d'ailleurs. Les scénaristes n'ont pas compris ou alors les temps changent. Depuis qu'un TRex est mort dans JPIII, j'ai l'impression qu'il faut absolument redorer le blason de l'animal. Mais qu'est-ce que s'en fou ? Face au TRex (devenu le gentil dinosaure qui tue les méchants), il est donc inutile de s’inquiéter.
Les personnages. Peut-être le point le plus problématique du film. J'ai l'habitude de dire qu'il ne peut pas avoir de bons films sans de bons personnages. Il est difficile de comprendre le virage à 180° de Claire entre les deux films. Quasiment tous les autres (sauf Owen assez appréciable), ne sont qu'une avalanche de stéréotypes et de caricatures. Il y a l'informaticien binoclard et peureux, la paléovétérinaire intello qui n'a jamais vu de dinosaures. Les "méchants" doivent absolument être et agir en idiots et avoir des dialogues qui vont avec. Les riches n'ont forcement aucune éthique. Les russes sont évidement des trafiquants d'armes. Au delà du comportement, il y a aussi le look...
JWFK profite du retour de Ian Malcolm, un retour mis en valeur dans la promotion du film. Tout ça pour ça ? Il n'apparaît quelques minutes pour quelques phrases moralisatrices. En d'autres termes, son apparition à l'écran est gratuite et n'a aucune influence sur le script. Il n'est là que pour faire un semblant de lien avec la première trilogie, somme toute artificielle. C'est aussi le cas du personnage de Lockwood, un collaborateur de John Hammond dont on ne sait pas d'où il sort et qui est éliminé assez vite de l'histoire. Je veux bien qu'on complète la mythologie mais il faut que ce soit un minimum approfondi. Même Wu, un personnage central dans la saga JW n'est pas satisfaisant.
Avec autant de choses superficielles, difficile d'avoir de quelconques émotions. Pas de tension, pas de frisson, aucun effet de surprise. On sait d'avance ce qui va y passer. Les "gentils" profitent de nombreuses facilités pour leur sauver la mise. On ne s’intéresse plus aux dinosaures (dont certains ont des ressorts comiques), on n'apprend rien d'eux. La grande scène finale avec le super-dinosaure se doit d'être désormais un combat. En fait, si les Jurassic World s'appelaient "Dino Fighter", cela passerait bien mieux !
Pour terminer, je vais quand même parler de la réalisation de Bayona. On peut dire qu'il fait ce qu'il peut avec ce scénario indigent. Il propose quelques belles images et d'effets de lumières intéressants. Néanmoins, certaines transitions entre des scènes sont mal gérées (fuite de l'île, arrivée sur le bateau). La musique a également perdu de sa superbe et est même agaçante, surtout dans le manoir de Lockwood.
Au final, on propose aux spectateurs un divertissement aseptisé et décérébré. Ce n'est pas la pseudo morale qui nous prouve le contraire. C'est un très mauvais Jurassic Park, d'ailleurs je vais désormais m'en tenir à la trilogie originale.