Resituons le contexte : tête dans le brouillard, les pensées embrumées par une rupture et la douleurs post intervention d'un ongle incarné (rigolez pas, ça pique un peu); je me décide d'aller voir ce Justice League afin d'aller m'égayer un peu... Au pire c'est juste du blockbuster avec des effets spéciaux, au moins je vais en prendre plein la tronche et ça va me faire penser à autre chose... Seulement voilà, passé l'introduction du film à base d'image prise sur un portable et de mâchoire en CGI d'un Henry Cavill qui a l'air toujours aussi constipé; je me dis que ce film ne mérite surement pas la douleur subie par le simple enfilage de chaussures. Pour résumé, j'ai vu le dernier bousin DC... et ça tourne mal.


J'aurais dû me méfier et ce dès les premières secondes avec ce viol rétinien que constitue cette dissimulation hasardeuse d'une moustache... Procédé dont l'utilisation est révélatrice d'une réalité douloureuse face à une production chaotique amenant divers reshoots. Je ne vous ferais pas l'affront de vous refaire le film sur le changement de réalisateur (bien que cela donne son titre à ma critique)... mais autant percer l'abcès tant qu'il est purulent : oui ça se ressent clairement quand on est devant Justice League que nous sommes face à un chiot difforme, produit d'un rapport sexuel forcé entre un doberman et un chihouhoua... Pour mettre fin à la métaphore, il est évident que le style de Snyder, remplacé au pied levé, ne se marrie pas à celui de Joss Whedon.


Indéniablement Justice League est un film malade, perdu entre les aspirations foireuses d'un studio qui peine à installer son univers face à une concurrence Marvellienne, un Zack Snyder aux ambitions narratives et visuelles bridées après la réception mitigée de son Batman v Superman et Joss Whedon devant s'installer à la hatte dans les bottes de Snyder... enfin bref, avant même d'arriver en salle ce film avait tout du ratage industriel prévisible. Ajoutons y la communication foireuse de la Warner qui juste avant la sortie nous balance un "Bon au fait Justice League n'est pas envisagé comme étant le pinacle de notre univers; on veut juste faire des films avec ces héros qui se "suffisent à eux même"". La bonne blague. Et c'est parce qu'ils avaient cette ambition qu'ils ont parasités la production de BvS afin que celui se force à introduire la Justice League ? Allez vous faire mettre Warner... Clairement il s'agit d'un damage control face à un produit répondant peut être à leur cahier des charges du blockbuster parfait pour attirer les gamins qui veulent du fun, mais qui se révélera décevant pour tout ceux attirés par les promesses initiales de cet univers. Vous savez quand Warner prétendait faire de "vrais films" qui seraient "différents"... avant de se raviser et de faire du Marvel Liddle.


Car oui maintenant prenons le film tels qu'il est et pour ce qu'il est. Analysons le froidement et le plus "objectivement" possible. Et bien c'est carrément moyen. Alors c'est divertissant, mené avec un tels rythme de sorte que l'on ne s'emmerde pas devant... En bref ça peut vous faire votre dimanche soir. Mais pour peu que vous ayez vu un film de super héros ces dix dernières années, il sera difficile pour vous d'être impressionné ou surpris par ce Justice League.


Rien que le postulat : "Une menace extraterrestre s'abat sur Terre dans le but de s'emparer de notre monde à l'aide d'artefacts qu'ils veulent récupérer. Des héros vont s'unir afin de les empêcher de s'emparer de ces artefacts... et comme ils vont forcément échouer; ils vont s'unir encore plus afin de bosser en équipe dans un climax pétaradant où ils vont poutrer les méchants". Alors là je viens de vous résumer quelques un des blockbusters des années 2010 (Transformers, Avengers , les Gardiens de la Galaxie par exemple) mais surtout Justice League. C'est horriblement convenu. Alors je ne suis pas en attente d'un scénario révolutionnaire et j'ai conscience qu'à Hollywood on recycle plus que l'on ne créé. C'est une forme scénaristique basique, certes, mais qui a démontré son efficacité et qui peut convenir à un film de type "réunion de personnages". Donc en fait je ne critique pas tant ce "réemploi". Ce vis à vis de quoi je suis le plus sévère c'est cette incapacité qu'à Justice League de bâtir une chaire cohérente autour de ce squelette narratif... Dans un bon film cette chaire serait constituée de personnages marquants et d'un bon développement de ces derniers, d'enjeux convaincants, d'actions trépidantes... le tout porté par une réalisation scotchante. Et force est de constater que rien de tout cela n'est présent de manière réellement convaincante.


Alors abordons tout ce qui est de l'ordre visuel. Déjà soulignons la production design qui est... moche. Cela transparaissait parfaitement dans les bandes annonces et se révèle une réalité devant le produit fini. Visuellement, Justice League est dégueulasse. Je n'ai pas d'autre mot à employer. La photographie est impersonnelle, les CGI sont laides (on se dirait revenu 15 ans en arrière, à l'époque de la prélogie Star Wars... qui est plus convaincante au niveau de ses fonds verts), la réalisation est banale. Une question que j'ai souvent entendue concernant Justice League est "où sont les reshoots de Whedon ?". Personnellement je poserai plutôt cette question "où est Snyder ?". Car même dans des scènes entièrement supervisées par ce dernier, les faits sont là : il y a un manque évident d'icônisation des héros. Quand on se souvient à quel point il avait le soucis de créer des cadres visuellement impactant et évocateurs, quitte à parfois virer dans le pompeux, on ne peut qu'être surpris devant ce Justice League aux cadres avant tout fonctionnels. Même dans des moments purement Snyderien tels que le générique, cela se ressent que c'est du Snyder Liddle tant la puissance et le souffle épique viennent à manquer. Sérieusement, il n'a rien trouvé de plus évocateur pour souligner la perte de l'espoir dû à la disparition de Superman, que de nous montrer un gros raciste qui renverse des cagettes d'oranges et un SDF, le tout au ralenti ? Il pouvait pas faire plus ? D'ailleurs ce monde sans espoir, c'est aussi à côté de la plaque quand on part du principe que ce n'était pas forcément mieux quand Superman était là...


Mais pour en revenir à l'aspect visuel, il faut dire qu'à ce niveau là, ce film est une honte pour un budget pareil. Comme je l'ai écrit, on a juste une caméra qui se contente de montrer des mecs cosplayés qui font des trucs... avant que leurs doublures numériques ne prennent le relais. Il est communément dit des films Marvel qu'ils ne proposent aucune idée de mise en scène... et bien là c'est encore pire. Et plus impardonnable dans un DCCU qui avait la prétention de nous offrir des œuvres avec une ambition visuelle. D'ailleurs pour digresser, il y a des idées de mise en scène chez Marvel. Par exemple dans Civil War on peut voir un jeu constant de mise en situation de héros aux pouvoirs surhumains dans un contexte quotidien qui certes, les désacralise mais replace en même temps leurs capacités et pouvoirs. Ce que l'on perd en "icônisation" et style, on le gagne en "crédibilité ". Et bien dans Justice League on n'a même pas ça. On est vraiment devant le niveau zéro de la mise en scène... mais on s'en fout, la mise en scène c'est le genre de trucs qui intéresse uniquement les "Jean Cinéphile" pas le public adolescent visé par ce bidon de lessive.


Bidon de lessive, l'expression est lancée tant il est évident que ce long métrage a été pensé selon un cahier des charges précis afin de maximiser sa réception publique. Les gens reprochaient à BvS d'être trop sombre ? Et bien Justice League se révèle optimiste. Ce qui en soit n'est pas un problème. Ce serait même plutôt logique. Sauf que cet optimisme a été forcé par l'incursion d'un humour malvenu. Encore une fois on fait un procès au MCU sur ce point, mais jamais je n'ai été sorti de leurs films par cet humour. Ici quand on voit nos héros lancer à tout va des punchlines dans des moments dramatiques... Bah ça sort du film car incohérent dans l'univers mis en place précédemment. Je n'ai rien contre l'humour dans un film même si il est placé dans des situations dramatiques. Après tout c'était ce que faisaient beaucoup de divertissements des années 80. Sauf que encore faut il que l'humour soit vraiment drôle. Et quand j'ai constaté le silence gêné présent dans la salle durant l'ensemble, j'ai du mal à croire que cet humour a pu faire mouche à un seul instant. Est-il constant ? Non. Mais il est clairement envahissant dans le sens où c'est loupé et que ça contribue à désamorcer les enjeux. Surtout quand on ajoute le fait que ces derniers sont inexistants.


Le pire étant que ce film ne se contente pas de désamorcer ses propres enjeux à cause d'une dramatisation aux abonnés absents... Non le pire étant qu'il en vient à désamorcer des enjeux ultérieurs des précédents ouvrages de cet univers.


Prenons la question de la résurrection de Superman. Vous vous souvenez dans BvS à quel point la simple idée qu'il y ai ne serait ce qu'1% de chance que Superman puisse être hors de contrôle et devienne l'ennemi de l'Humanité pouvait hanter Bruce Wayne ? Vous vous souvenez que cette idée a failli faire de ce dernier un criminel ? Et bien ici, c'est traité à la blague. Certains pourront argumenter que Bruce a changé et que son avis sur Superman aussi. Ils pourront aussi dire que la menace de SteppenWolf mérite que l'on courre le risque de ressusciter l'Homme d'Acier même si ce dernier pouvait devenir hors de contrôle. Et en soi je serais d'accord avec ces personnes. Or le soucis ici repose surtout dans le traitement léger de l'ensemble. A quel point les personnages semblent détachés de ce questionnement. Il aurait fallu axer davantage la menace de SteppenWolf, montrer de façon plus prenante ses ravages... D'ailleurs une menace globale dont la nature est diminuée quand on voit que pour lutter contre les Parademons, créatures qui se devaient d'évoquer la peur, une petite fille s'empare d'un insecticide parce que... lol les sbires du méchant ressemblent à des insectes. Putain mais sérieusement ?Pour en revenir à la résurrection de Superman, il aurait fallu insister sur le fait que c'était une mesure désespérée. Mais il n'en ai rien. SteppenWolf ne fait pas tant de victimes que cela, sa menace peut être facilement mise hors d'état de nuire (suffit de détruire la boite qu'ils ont en leur possession). Tout ça parce que le film dans sa volonté de faire plus "léger" se refuse à toute dramatisation, prise au sérieux de ses enjeux... Et après certains vont défendre cette merde et critiquer Marvel ?


Indéniablement il y a un réel problème "d'investissement émotionnel" dans Justice League... Problème car jamais il ne prend la peine et le temps de poser la dramaturgie de ses situations. Je veux bien que l'on réalise un blockbuster "léger", mais même un Pirates des Caraïbes qui appartenait à cette mouvance, possédait des moments de tension, de drame et surtout on s'investissait dans le film car on avait envie de suivre ces personnages. Ici, j'en ai rien à battre de Batman car il semble une parodie de celui que j'ai connu dans BvS... quelqu'un qui a été marqué par 20 ans de lutte contre la criminalité dans le film précédent... mais qui ici repense à ces dernières années comme étant le "bon vieux temps". J'en ai rien à foutre de Aquaman qui entre deux scènes où il sert de modèle pour une pub de parfum pour homme, fait d'autres trucs pour juste avoir l'air encore plus badass. J'en ai rien à foutre de Flash, personnage bidimensionnel qui semble là surtout pour me faire marrer. J'en ai rien à foutre de Superman qui


une fois ressuscité semble dénué de toute séquelle, qui prend tout à la blague et qui s'inquiète surtout pour son odeur corporelle. D'ailleurs on soulignera le mauvais goût de sa réponse à Loïs Lane qui lorsqu'elle lui demande ce que cela fait d'être ressuscité, il lui répond que "ça gratte"... On serait tenté de mettre le coup de cette réplique malvenue sur le dos de Joss Whedon, mais quand on se souvient que ce dernier a pris toute une saison pour décrire le traumatisme d'une telle situation vécue par son héroïne dans sa série "Buffy contre les Vampires", on réalise que cette note d'humour est bien plus le fait d'une volonté forcée d'alléger le film que d'une incapacité de Whedon à saisir des enjeux dramatiques.


Finalement la seule qui s'en sort là dedans c'est Wonder Woman. Et j'ignore pourquoi tant son développement est inexistant ici... Il y a une petite piste, une amorce de quelque chose... mais non. Ah et Cyborg ? Il est comme son design : commun et oubliable.


Puisque j'en suis à évoquer des trucs oubliables... Parlons de la musique de Danny Elfman. Mais en plus cette dernière se paie le luxe d'être à côté de la plaque lorsque discrètement va nous replacer les thèmes iconiques des personnages dans des moments... random.


Par exemple il est complètement aberrant d'entendre le thème mythique de Superman composé par John Williams dans un moment où l'Homme d'Acier tout juste ressuscité et hors de lui, se bat torse nu contre Flash et au ralenti. Ces notes auraient été bien plus pertinemment placées pendant un moment de "gloire" du héros... Comme par exemple quand il intervient à la fin et sauve la situation.


Et d'ailleurs ces notes iconiques surgissant aléatoirement, perdues dans une bande originale parfaitement banale; symbolisent parfaitement ce Justice League : Des figures iconiques perdues dans un long métrage médiocre.


En conclusion, Justice League n'est pas mauvais dans le sens atroce... Il est juste horriblement commun dans sa structure, médiocre dans sa réalisation, à côté de ses pompes dans son écritures. Heureusement qu'il n'est plus censé être le "pinacle" de cet univers, cela aurait été presque tentant de le condamner définitivement dans ce cas...

Hunter_Arrow
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le 16 nov. 2017

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