L'annonce du DCUniverse et plus particulièrement de Justice League, sonnait comme un clairon de renouveau :
S'écartant des sempiternels produits Marvels qui ne font qu’amorcer le prochain épisode, l'univers DC, s'inspirant de la noirceur de Christopher Nolan, tentait une approche plus philosophique, mystifiant ses héros tel des Dieux vivants, plutôt que de les réduire à des blagueurs potaches.
Un univers amorcé par un "Man of Steel" qui questionnait intelligemment le rôle de sur-humains avant de confronter ce demi-dieu à ses antagonistes humains, montrant par là-même toute la contradiction du super-héros, responsable de ses plus grands ennemis.
Cependant, cette dimension mythologique porté par un Zack Snyder passionné et convaincu de sa vision mêlant spectaculaire et pessimisme n'aura réussi qu'à convaincre mollement le public et encore moins les critiques.
Souhaitant satisfaire le plus grand nombre, la Warner opta pour un virage à 180°. En résultera une hérésie de production au nom de "Suicide Squad", pourtant confié à l'excellent David Ayer, qui n'aura eu de cesse de prouver, tout au long de sa filmographie, l'impossibilité du groupe et soon inexorable destinée à ne pouvoir qu'imploser. Mais c'est à travers ce film, cousin raté de l'incroyable succès pop des "Gardiens de la galaxie" que la Warner montrait sa volonté de vouloir coller à son concurrent qui ne cesse de réaliser des chiffres faramineux, pensant qu'il suffirait de recopier la recette pour que cela fonctionne.
S'en suivit, le trop sur-estimé "Wonder Woman", qui derrière un vide abyssal d'enjeux, est tout de même parvenu à devenir l'égérie féministe du genre super-héroïque. Creux et simpliste, le film demeure pourtant le plus populaire de l'ère du DCU convaincant ainsi la Warner de plus croire en la vision mystique et noire de Snyder.
Annoncé au premier abord comme le "Avengers" de DC, le film perdit en cours de route son réalisateur, accablé d'une tragédie familiale. Il n'en fallait pas plus à la Warner pour saboter le projet en confiant les rênes au papa d'Avengers.
Mais si la réunion Marvel fut un aussi grand succès, cela reste surtout dû à une réussite de production étalée sur cinq ans de projet et sur cinq films formant un tout, plus qu'à la vision primaire d'un gamin de 12 ans qui résume le genre super-héroïque à des combats contre des monstres qui pullulent de partout dirigé par un grand manitou super-vilain (parce que oui, Avengers c'est quand même un peu ça).
Le film tant attendu, celui qui devait concrétiser les espoirs portés par les films Snyderiens, qui ont rendus ces êtres costumés plus que les idoles des jeunes, les rendant aussi impressionnants qu'effrayants, capables de créer les plus grands fléaux de l'humanité, tout en étant les seuls à pouvoir l'en préserver....Finira au final par n'être (presque) qu'aussi risible que le grandiloquent cartoonesque des films de Joel Schumacher (Batman Forever, Batman & Robin). Et c'est dire.
Le film est en totale dissonance avec son récit. La menace qui grondait à la fin de l'Aube de la Justice est si peu esquissé ici, qu'elle ne prend jamais l'ampleur qui permet l'union de cette League. Une union qui prend extrêmement de temps à se construire mais qui parvient quand même à foirer ses personnages, les rendant assez unilatéraux, perdant par là-même toute l'ambivalence mythologique installé précédemment. Pire, même les acteurs ne semblent plus y croire : Ben Affleck semble affligé de son propre sort pendant les deux longues heures du métrage, Ray Fisher semble confondre Cyborg et C3PO tandis que Ezra Miller pense que Flash n'est qu'un Sheldon Cooper sous acide. Reste Gal Gadot et son irrésistible plastique (que grand bien lui fasse par ailleurs tant, il semblerait que ce soit bien sa seule qualité pour ce rôle) et Jason Momoa en terrible vengeur des mers, qui tente à lui seul de nous convaincre de l'aspect mystique de ces héros. En vain.
Et ce n'est pas le retour du fils prodigue Henry Cavill aka Superman qui viendra sauver l'affaire. Réduit à des misérables scénettes, sa résurrection tant attendu (et si évidente) ne sera au final qu'un petit break entre deux fights d'images de synthèse ô combien laides (mais pas autant que cette moustache effacé numériquement) pour ne servir au final à rien, si ce n'est à faire la course avec Flash pour savoir qui a la plus grosse (vitesse).
La promo mettait d'ailleurs en avant beaucoup d'humour et oui, le film est loin d'en être démuni mais si seulement cela était fait avec intelligence et parcimonie, cela aurait pu donner quelques moments sympas qui sont ici gâchés par le décalage consternant au vu de la gravité de la situation dans laquelle se trouvent les personnages.
D'un côté un peu plus technique, le film parvient à donner le change dans son action assez bien orchestré rendant le tout constamment vif et dynamique. Malheureusement, le tout semble être pris d'une sérieuse maladie mentale : on alterne des poses ultra badass et stylés, capables de résumer toute l'ampleur du personnage à travers un seul plan à des scènes qui auraient pu être faites par un réalisateur de troisième zone totalement dénuées de langage cinématographique. Une schizophrénie qui ne parviendra jamais à faire pencher la balance du côté du positif tant à côté, il ne semble plus rien à sauver...
Entre des images de synthèses qui feront presque regretter le fluo de Green Lantern (au moins, même si c'était moche, c'était rigolo), un méchant affreusement ridicule qui rendrait presque profond les antagonistes Marvels pourtant bien unidimensionnels et la musique qui semble être un best-of des thèmes d'Elfman, on ne sait plus quoi sauver de ce naufrage artistique. Même la photo a perdu de sa superbe, ne parvenant jamais à maîtriser parfaitement tous ces effets visuels (et aussi parce qu'elle n'est plus supervisée par celui qui parvenait à rendre palpable la Snyder Touch, pratiquement absente du film).
Le film promis n'est donc pas et il nous montre tout le problème de ces univers engrangés de films en films : pour exister et être supervisés par des studios suffisamment lourd pour leur donner toute leur dimension, ces Heros Universe doivent se passer de qui avait tant d'éclat aux grands films du genre : de la vision d'un réalisateur qui tente de raconter quelque chose.
Il ne suffit pas de réunir les héros les plus stylés et de les faire se battre pour faire un grand film. Mais il suffit de saboter la vision d'un réalisateur pour en faire une injustice indigne.