A l'image de Lancelot, l'ensemble est raide et perdu

Je vais commencer par la pénitence qu'exige toute critique du film : oui, j'adore Kaamelott, certes un peu moins les livres 5 et 6 même si je leur trouve des qualités narratives vraiment intéressantes.

Face au film, je me suis demandé si Astier ne s'était justement pas gargarisé de la totale immunité dont dispose son univers aujourd'hui. Dans une récente interview, il donnait quelques coups de menton en affirmant qu'il ne faisait que ce qu'il voulait.

Et bien ça se sent vraiment ici, car Astier s'est probablement attaqué à un trop gros morceau en solo.

Je vais passer très vite sur le montage et sur la chorégraphie de la scène de combat de "fin", atrocement chaotique, laide et parfois gênante car proche d'un film étudiant (la fumée, les coups d'épée qui visent bien l'autre épée, bref...).

Je vais également passer sur le rythme effréné du film, qui ne laisse aucun temps de respiration aux personnages (leur développement est donc inexistant), au scénario cousu de fil blanc avec les Burgondes, à l'hommage trop lourd à Star Wars, aux flashbacks laborieux (histoire de rendre le rythme encore un peu plus épileptique), au contenu homéopathique en nouvelles punchlines gagesques qui faisaient tout le sel de Kaamelott.

Je vais me focaliser sur Lancelot, car il me semble qu'il incarne tout le nœud du problème.
Alors qu'il était un antagoniste qui montait sans cesse en puissance dans la série, ici RIEN ne va.

- Le costume. C'est tout sauf un détail. Le "costume" de Lancelot tue complètement son jeu, l'acteur est raide, irréel, n'a plus aucune communication non verbale, c'est tout juste si l'on voit son visage en entier.
Fait plus subjectif, le costume est ultra laid, ce qui retire toute crédibilité au pauvre Lancelot.

- Le caractère. Dans le "développement" de Lancelot, le clin d'œil à Darth Vader est trop appuyé. Sauf que Vader ne se fait pas "bolosser" par ses sujets, dont l'atroce Clavier qui hurle comme toujours. Comment Lancelot peut-il se faire promener par ses sujets, alors que c'est ce qu'il reprochait à Arthur ?

- Les Saxons engagés par Lancelot. Le nom de la jeune lieutenant Saxone m'échappe, mais n'y a-t-il pas un GROS problème de jeu avec elle ? Et pour des soldats de l'Empire, les Saxons se foutent bien de Lancelot, qui ici aussi n'inspirera aucune crainte.

- Enfin, point crucial : l'objectif de Lancelot. Méléagant ne semble guère avoir d'ambition ; Lancelot a mis Arthur en exil, dispersé les chevaliers de la Table Ronde, règne dans la forteresse, et pourtant il ne fait rien. Rien, à part s'entourer des pires "ministres" possibles, d'être en banqueroute et de recruter des mercenaires hors-sol.
Il n'y a même pas une petite Etoile Noire en construction, pas un début de plan pour la suite ; Lancelot devient un antagoniste fantôme, inintéressant, blasé (on avait déjà assez d'Arthur sur ce point).
Lancelot est perdu.

Quel est le sens de tout cela ?

Dois-je me raccrocher au cliffhanger avec Lancelot et son vilain costume accompagné d'un fantôme de 20 mètres de haut (je suis certain que ça n'apportera rien) ?
Dois-je me raccrocher aux 5 secondes avec Méléagant ? C'est dommage, car 5 minutes au lieu de 5 secondes auraient sûrement été bénéfiques au socle du film...
En sacrifiant la scène ultra gênante du "jeu" de Perceval et de son frangin (pourquoi montrer AVEC INSISTANCE quelque chose qui n'est drôle que lorsqu'il est suggéré ?), il y avait 5 minutes à récupérer.

Bref, cela n'enlève en rien tout ce que Kaamelott a pu apporter auparavant, à sa saveur, à l'espoir qu'il a donné à tous ceux qui étaient un peu réticents face aux prods françaises.
C'est juste un couac qui prouve que la narration au cinéma est une autre paire de manches.