Il était une fois en Kafkaïde
Soderbergh a pour habitude de changer de registre et d'univers. Ce qui relie tous ses films, au final, ce n'est rien d 'autre que sa volonté d'agir par concept mais aussi son amour pour le cinéma. Ici, au travers d'un univers Kafkaïen dans lequel il s'amuse à citer les divers romans de l'écrivain, il se réfère principalement à l'expressionisme allemand.
La mise en scène est vraiment sympathique. Dès ses débuts le petit Steven savait placer sa caméra judicieusement. Ses références sont intelligentes, même si parfois évidentes (l'oeil), et la forme semble s'ajuster au fond (ce n'est pas pour rien si le réalisateur choisit l'expressionnisme pour traiter de cette manipulation allant jusque dans l'aspect biologique de l'être humain).
La direction d'acteurs permet à l'auteur d'insuffler un certain humour et de révéler le double sens des dialogues. Jeremy Irons ne m'aura jamais autant fait rire (en fait je n'ai pas vu de comédie avec lui).
Le scénario est sympathique. Non seulement le spectateur peut s'amuser à retrouver les références aux diverses histoires de Kafka mais en plus il assiste à une sorte d'enquête aux frontières du fantastique. Le mystère et le ton de cet univers décalé permettent de captiver, puis les coups de théâtre prennent le relais.
J'ai donc fortement apprécié cette incursion à la fois dans un univers du cinéma dépassé mais également dans un univers littéraire trop rarement adapté. Ces deux concepts en un film m'ont passionné, mais je comprends que cela puisse rebuter d'autres pour ces même raisons qui m'ont conquis. Je reprocherai peut être un manque de scènes fortes. J'avais souvent l'impression que Soderbergh aurait pu aller plus loin dans ses idées (la mise en scène en scène pour l'oeil justement manque d'un petit je ne sais quoi pour être encore plus percutant). Je recommande donc ce film pour ceux qui aiment le cinéma plus "d'auteur" de ce réalisateur (un peu dans la veine de 'The Good German').