Que celui qui n'a prêché me jette le première pierre....

Encore une agréable surprise que ce film de propagande qui joue habilement de la dérision et du ridicule avec, de plus, une réalisation très inspirée.
Ça commence comme un documentaire sociale assez dur et cru où des familles entières vivent dans des taudis envahis par des rats et dont les éboulements frappent les enfants durant leur sommeil.
Les plans sont à chaque fois parfaitement composés avec une photographie admirable, renforcés par une utilisation assez virtuose des lentilles et des focales pour donner à chaque image une personnalité propre : contre-jour lumineux, halo, flou, absence de profondeur de champ...


Assez rapidement, une fois que la jeunesse et les communistes décident de détruire l'église instable, Hors du chemin bascule dans la satire, opposant la jeunesse vaillante en quête de renouveau à un défilé de réactionnaires grabataires, de bigotes éructant et autres conservateurs bornés qui ne veulent pas qu'on touche à leur monument et qui remuent ciel et terre pour faire le faire reconnaître comme site historique.
On est pas dans la grande finesse et la réalisation, comme le choix des comédiens, appuient cette opposition de manière la plus frontale possible et de façon assez efficace il faut admettre. Hors du chemin n'est cependant jamais aussi réussi que lorsqu'on suit la masse de plus en plus grands des défenseurs de l'église qui vont ainsi chercher le maire qui va fêter ses 40 ans au pouvoir et dont plus personne ne se rappelle pourquoi il est élu et ce qu'il a fait pour le village mais que tout le monde vénère comme une relique, s'extasiant ainsi sur son pantalon traînant sur un paravent. La tradition pour la tradition.
Plus le film avance et plus on vire dans la farce aussi caustique que surréaliste comme la longue séquence (rêvée) de la procession funéraire qui devient une mini guerre civile moyenâgeuse entre différents factions de gâteux déconnectés qui s'attardent quand même pour prendre la pose (y compris le mort dans son cercueil) lorsque l'équipe du film leurs demande de ne pas oublier la caméra
Du coup, à chaque fois qu'on revient dans la pure opposition entre "anti" et "pro", le film perd en rythme et humour pour s'avérer trop didactique et manichéen. Et j'avoue que le leader des komsomols est encore plus inquiétant que les p'tits vieux, ce qui n'était sans doute pas la volonté première. On devine le mec qui va bientôt envoyer fissa le moindre opposant au goulag sans le moindre état d'âme.
La conclusion du film va forcément dans le sens des komsomols qui découvrent que l'église n'a rien d'historique mais date d'Alexandre III et qu'elle a servi d'office de propagande chrétienne.


Contrairement à ce qui était indiqué dans le programme, le film ne durait pas 1h mais 90 minutes. C'est dommage car réduit d'une vingtaine de minutes pour ne garder que la charge satirique, Hors du chemin aurait été une savoureuse comédie... Mais pas forcément très percutant dans ses ambitions "réformatrices" il est vrai.

anthonyplu
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le 29 déc. 2017

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anthonyplu

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