Exceptionnellement, je me fendrais pas de mon habituelle critique longue et argumentée car le film ne s'est pas donné la peine de faire un travail idoine avec ce remake. Ainsi parlait l'un de mes vieux maîtres universitaires "Je vous ferai ce que vous ferai à ma matière", ce qui, ici, prendra tout son sens.
Kickboxer premier du nom, sorti en 1989, s'inscrivait dans la lignée des films bisseux consacrés à l'art du "coup de pied dans la gueule" - popularisé par les navets de la Canon mettant en jeu le plus souvent Chuck Norris ou Michael Dudikoff - avec une certaine candeur - photo souvent facile, image laide, scénario tenant sur un timbre poste. Cependant Kickboxer premier du nom n'était pas sans idée. La scène où Tong Po s'échauffe contre un pilier en béton avec pour seul son les coups sourds de son tibia effritant le mur était parfaite de justesse, point trop n'en fallait pour poser là un personnage sauvage, animal, froid. Il n'y a, dans certaines scènes, pas besoin de mots, ou si peu ("le mythique I must break you" lancé par Dolph Lundgren à Stallone dans Rocky IV d'une voix rauque presque métallique résume à elle seule tout l'enjeu humain, politique, du film, bien plus que le barnum déployé dans le reste du métrage) pour installer une atmosphère . Le point fort de ce Kickboxer était d'introduire à l'instar du cinéma asiatique une façon différente de filmer les combats (ralentis nombreux, volonté de rechercher une esthétique dans la violence) tout en s'appuyant sur une musique dans l'air du temps et rythmée. Le résultat avait été assez planant, la fin des années 80's se prêtant à une esthétique new-age tant pour la bande son que pour la photo d'ensemble. Paul Hertzog avait fait un boulot impeccable, certains titres comme The Eagle Lands sont encore des références un tantinet Oldschool, et les plans de vues sur fond de coucher de soleil, banals dans les productions de l'époque, permettant cependant d'apprécier les chorégraphies des Katas sous forme d'ombres chinoises, faisaient encore école quand en 2004 sortait Le dernier Samourai d'Edward Zwick qui usait du même artifice avec efficacité.
Mais dans le Kickboxer de 2016, à part le plaisir coupable de retrouver Jean-Claude van Damme qui tient son rôle avec un air amusé et encore de beaux restes physiques - quoiqu'un maître asiatique aurait été une meilleure option pour une question de crédibilité - on a perdu la saveur de l'opus de 1989. L'image est belle, certes, mais certains effets CGI laissent à désirer, et la photo ne sort pas du cadre de ce qui se fait dans les direct-to-video depuis déjà une décennie. Les combats se rapprochent de ce que produit par ailleurs Scott Adkins, et tout comme le Tong Po 2016 incarné ici par Dave Bautista - pour la santé duquel je crains à force d'ingérer des cocktails douteux - le film souffre de vouloir trop en montrer, trop en faire. Le scénario, comme souvent dans ces films tape à l’œil, est indigent tout en réussissant quand même à nous perdre. Certaines scènes n'ont aucune justification sinon de placer des combats, gratuitement, et pas toujours filmés au mieux (les deux duels qui introduisent Dave Baustista n'apportent strictement rien). La nudité des deux concubines de Tong Po est là aussi gratuit et amené avec une certaine vulgarité, on sent la passage raccoleur. il n'est pas étonnant de voir au casting féminin de premier plan un mannequin érotique anglo-thailandaise dont le plus haut fait d'arme est d'exhiber sa poitrine refaite en moins de 30min de film. Une habituée que l'on retrouve souvent citée pour ses scènes lesbiennes dans un film de prison, bref la grande classe.
Il manque le dépouillement du premier, qui à défaut de le rendre réaliste, lui conférait une certaine crédibilité, il en manque la candeur du héros et surtout la bande-son hip-hop est du plus mauvais goût là où le Kickboxer de 1989 avait pris soin d'orientaliser la composition, afin de faire voyager le spectateur. L'original avait marqué une génération avec sa musique, celle de cet opus fera pschiiit dans la mémoire collective. Je n'aborderai pas le montage incohérent, les scènes gratuites, les coups inutiles, même les combats sont mal filmés. Coté jeu d'acteur, nous repasserons.
Plus violent, plus friqué dans sa production, ce Kickboxer demeure un produit carré, formaté pour la jeunesse urbaine occidentale, et encore une jeunesse rompue aux codes MMA/Hip-hop, qui ne fait ni peur, ni frissonner, ni spécialement voyager sauf quelques belles images (surtout au début) de vieux temples, de rizières, de rues... bref ennuyeux, sans la saveur et le caractère de son modèle. Pour voyager préférez un bon documentaire de National Geographic, pour le reste, quand il ne tourne pas dans un navet, Scott Adkins offre bien plus de plaisir, et je ne parle pas des productions - véritablement - asiatiques.