Shawn est une employée de banque dépressive et suicidaire, mais également la maîtresse d’un homme marié, le vice-président de l’établissement qui l’embauche,. Au cours d’une énième scène de ménage, elle découvre qu’il ne compte pas du tout quitter sa femme qui est d’ailleurs enceinte. Shawn, désespérée, monte en haut de l’immeuble avec l’intention de sauter dans le vide. La police arrive pour la sauver mais tombe sur des braqueurs qui attaquent justement le fourgon venu livrer la banque. Charlie, un des bandits, prend Shawn en otage et s’enfuit. Le problème, c’est que la jeune désespérée exige de se faire abattre une fois l’évasion réussie.


Dana Lustig n’est pas très connue, et Kill me later est un film qui est passé plutôt inaperçu malgré la présence de Selma Blair. Pourtant, il pétille de qualités. Le montage ressemble à un clip psychédélique des années 70 avec le rock décalé qui va avec. Cela donne un rythme syncopé, un côté absurde, voire irréel, et autorise Dana Lustig à se passer de trop de réalisme.


L’histoire de ces deux paumés écorchés par la vie, dramatique par définition, est adoucie d’humour bon enfant et entourée de personnages secondaires attachants. En effet, dans cette œuvre, tout le monde a fait des bêtises par le passé, tout le monde a été blessé, et personne n’est vraiment méchant. Le duo Blair — Beesley ne possède pas une alchimie extraordinaire mais les deux acteurs sont bons et arrivent à nous tirer des larmes de rire comme de tristesse. À l’époque, Selma Blair était peu connue et jouait souvent des crucruches (comme dans Cruel Intentions, par exemple). Mais le vécu de cette actrice la rend particulièrement crédible dans son rôle de désespérée, certes toujours un peu crucruche. Max Beesley, quant à lui, débutait tout juste au cinéma. Il joue bien la racaille mais très mal le criminel et c’est tant mieux parce que cela le rend d’autant plus attendrissant.


Le scénario n’est pas important, c’est un road movie ultra-classique mâtiné d’humour. La plupart des personnages sont paumés (même les flics sont blessés ou en galère de vie privée) et accommodants avec une histoire de moins en moins réaliste.

Des flics qui lâchent l’affaire quand ils ont retrouvé le pognon, c’est rare.

Il y a des coïncidences un peu trop appuyées et la fin est téléphonée quasiment depuis le début du film, mais c’est pas grave. Ce qui est important, c’est la reconstruction de Shawn, ballottée avec délicatesse par un apprenti gangster vraiment pas doué pour le crime. Elle trouve enfin quelqu’un qui s’intéresse à elle tandis que Charlie cherche la rédemption au travers du sauvetage de cette gamine dépressive. Bien sûr, il s’agit d’un emboîtement du complexe du sauveur avec celui de la victime et ça fonctionne mal dans la vie réelle, mais c’est du cinéma alors on se permet de rêver. Et puis le rock, c’est vraiment cool pour planer. Alors on oublie que les acteurs ne se plaisent qu’à moitié, on oublie le manque de réalisme, on savoure les filtres bleus, la musique et les sourires qui finissent enfin par fleurir.

OeilDePatrick
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le 20 mars 2024

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