Killing
6.6
Killing

Film de Shinya Tsukamoto (2018)

Dans les premières minutes, on ne peut être qu'admiratif devant les cadrages et le travail sur le son. Pas feutrés dans la forêt, croisement des sabres de bois. L'intrigue se met lentement en place, par petites touches et apparitions impromptues. Et puis, une sorte de fatalisme géomantique émerge du lieu : les arbres semblent hors d'âge (on n'en voit jamais la cime mais la base du tronc donne une certaine idée), les tombes disséminées tout autour du village, la mousse qui a tout recouvert, et surtout l'incapacité à quitter le lieu. Le jeune samouraï est, malgré sa condition sociale, resté pour aider les paysans au travail des champs, le vieux rônin ne pourra plus partir non plus malgré son ambition de sauver le shogunat (on est probablement autour de 1860), pas plus que les bandits qui se sont installés en lisière du village. Jusque dans sa fièvre notre héros est poursuivi par une sorte d'esprit malin qui le ramène à la forêt. Il y a une véritable dimension surnaturelle qui justifie que tous ces destins se retrouvent précisément dans ce lieu et ce temps.

Cependant, même en y voyant une main surnaturelle, j'ai eu un peu de mal avec la personnalité des deux principaux protagonistes et surtout leurs errements : le gamin ne dévie pas d'un pouce dans son refus de tuer, même lorsque sa vie est en jeu aux mains de quelques ruffians qui ont auparavant massacré les enfants du village et menacent de violer sa copine... C'est un peu le mythe moderne du samouraï au sabre de bois. On doit être dans un chapitre secret du Bushidô que je n'ai pas lu mais cela semble surtout inconcevable. Le comportement du vieux est aussi déroutant et l'enchainement cyclique des événements en devient d'autant plus incompréhensible.

Autre point négatif, le traitement des combats. Comme dans la plupart des films modernes la caméra bouge trop vite autour des sabreurs, joue sur les changements de champs et donne des plans confus. C'est un effet de style, c'est immersif, on aime ou on n'aime pas.

J'ai tout de même eu la désagréable sensation qu'on tournait en rond, alors que le film est si court (le générique de fin apparaît au bout d'une heure quinze) qu'il ne devrait pas produire cette impression. Comme si Tsukamoto n'était pas parvenu à développer son idée initiale et ses personnages. Le choc recherché en montrant des enfants morts, des membres découpés et des entrailles à l'air semble surtout combler un film assez creux.

Yushima
6
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le 10 déc. 2024

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