Après Kick-Ass, Matthew Vaughn qui a entre temps réalisé « X-Men : Le Commencement », remet le couvert avec une nouvelle adaptation d’un comic du trublion Mark Millar, co-écrit cette fois-ci avec Dave Gibbons (à qui l’on doit les dessins de « Watchmen ») intitulé The Secret Service : Kingsman », justement traduit chez nous en « Kingsman : Services secrets ».
Il est intéressant de noter que Matthew Vaughn a également collaboré à l’élaboration de l’intrigue du comic. Le réalisateur fait parti de la relève du cinéma d’action anglais avec son copain Guy Ritchie dont il a produit « Snatch », « Arnaques, crimes et botanique » ou encore « À la dérive » et a dorénavant un noyau dur de fan qui attendent impatiemment ses nouveaux films.
Les derniers James Bond avec Daniel Craig ayant perdu de leur côté « gadget-marrants » des anciens opus, qu’en est-il de ce « Kingsman » qui a pour but de rajeunir et remettre au goût du jour ces films d’antan ?

Matthew Vaughn veut jouer le mauvais élève et le film est sans grande surprise. Oui, c’est sans grande surprise que l’on peut dire que « Kingsman » est dans la même veine que le premier « Kick-Ass », avec le même style que celui-ci, dans lequel on sent que Vaughn a été nourri aux clips et aux blockbusters biens calibrés. Sauf que le ton diffère légèrement et ce n’est pas une mauvais chose. Car « Kick-Ass » souffrait d’un défaut majeur, la condescendance du réalisateur quant au genre dont il s’inspirait à savoir le film de super-héros. Se pensant plus intelligent que son modèle alors qu’il ne réinventait au final pas grand chose. Mais ce cynisme était déjà visible dans l’œuvre initiale de Mark Millar avec cette satisfaction à humilier son héros.
« Kingsman » est pour le coup beaucoup plus respectueux vis-à-vis de ses ainés. Mais il ne serait pas incorrect de dire que le film dans son style est une sorte de Kick-Ass du film d’espionnage. Le film s’ouvrant par ailleurs sur une scène dans un chalet de montagne faisant clairement penser aux James Bond période Roger Moore que le réalisateur semble affectionner. Le film est pendant deux heures une vision post-moderne du genre, aux allures de parodie, mais qui se veut tout de même un peu sérieux, intensifiant les codes pour créer un va-et-vient entre humour et action.

Alors que l’industrie du cinéma a tendance à vouloir faire revenir sur le devant de la scène des espions avec un plus grand sérieux, il ne fait aucun nul doute que le public avec des films comme les « Austin Powers », « Max la Menace », « Johny English » ou encore « OSS 117 » chez nous, est habitué à voir sur grand écran leur caricature. Le style de Vaughn qui se prête bien plus au film d’espionnage qu’au film de super-héros, est une véritable déclaration d’amour à ces films, et reprend allègrement ce qui en faisaient leur succès : profusion de gadgets tous plus incongrus les uns que les autres, méchant ridicule aux prétextes non moins absurdes (ici un écolo au grand cœur), accompagné d’un bras (la femme d’Oscar Pistorius pour le coup) droit toujours doté d’un talent particulier qui se bat pour lui, etc.
Il use de cette grammaire tout en la corrigeant par son lexique épais, montage rapide, zoom numérique dans le plan, violence exacerbée, ambiance pop, faisant preuve de créativité. On le sent enthousiaste et inspiré dans ses propositions. Sauf qu’à force de faire semblant d’être quelque chose qu’il ne souhaite pas exactement être, le film le devient intégralement dès la moitié du film, devant se dépatouiller avec ça pour aller jusqu’au bout de son histoire. Mais toujours dans la joie et la bonne humeur. Souhaitant jouer sur les stéréotypes pour s’en moquer, le film en devient au final un, car oui le film se finit bien dans une base creusée dans une montagne infestée de méchants qui ne savent pas se servir de leur mitraillette !

Faire du moderne avec du old-fashion. Le film est aussi une confrontation, entre ce jeune de la middle-classe anglaise et ce vieil espion british glamour au flegme imperturbable, même lorsqu’il se rend à l’église. Il aurait été intéressant de plus creuser le scénario de ce côté, mais le film n’est pour le coup qu’une illustration d’ascension sociale atypique, le jeune lad devenant un gentleman respectable suite à sa formation. Car si le film joue des stéréotypes, les personnages en revanche en sont bien eux, manquant de finesse d’écriture et étant peu attachants. Mention spécial à Samuel L. Jackson qui cachetonne dans le rôle du méchant mégalomane écolo au fofotement drôle dès la première réplique, mais qui devient insupportable par la suite.
À constamment souligner ce qu’il n’est pas (les personnages parlent et se moquent des structures narratives des films dont il est la parodie), le film se regarde trop le nombril. Il passe deux heures à essayer d’être ce qu’il n’arrive pas à être, l’archétype du film cool. Et le film est cool. Parfois. Un peu. Mais à trop « vouloir faire cool », l’ensemble manque de spontanéité et donne un sentiment de profonde lourdeur. Le film n’est pas déplaisant mais s’enlise dans sa démarche de parodie forcée.

Le film souffre d’une vrai paresse d’écriture et bien trop souvent le film parodie pour parodier car on est là pour ça. On a donc un objet un peu hybride qui ne sait pas trop sur quel pied danser, très sérieux dans sa première partie, puis totalement parodique dans la seconde. Malheureusement le film ne propose pas grand chose et manque d’audace, se complaisant dans une vulgarité assez tendance. Je retourne de ce pas revoir son beau film d’espionnage des années 60 avec Fassbender en James Bond avec ses copains mutants.
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le 12 févr. 2015

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