Shut up or i'll punch your teeth down your throat !
Il y a quelques semaines Warrior pointait le bout de ses gants, et c'est maintenant au tour de Knuckle, un outsider inattendu, de venir lui-aussi jouer dans le cour des craquements d'os et autres saignements faciaux.
L'optique n'est cependant pas la même, pas d'histoire romancée pour atteindre le fond du cœur d'une vaste majorité, mais en revanche celle d'une guerre sans fin qui déchire des familles anglo-saxonnes (et principalement Irlandaises) de gens du voyage.
A vue de pif, ça fait très plouc, mais l'on décèle dans ces combats illégaux une certaine noblesse et un fairplay chevaleresque tout droit sorti du moyen-âge. S'il y a un problème à régler, un combat est arrangé, et les boxeurs s'affrontent, sans leurs familles, seuls des tiers étant autorisés à y assister et les arbitrer.
Le réalisateur, Ian Palmer, s'est investi durant 12 ans, suivant l'évolution de cette situation, qui n'aura jamais bougé, avec deux familles (principalement, d'autres étant survolées, comme les Nevin), les McDonagh et les Joyce, s'affrontant dans une lutte sans fin. Palmer va de l'une à l'autre pour tenter de rester objectif, mais très rapidement on finit par avoir une préférence, et celle-ci va pour James Quinn McDonagh, fier représentant invaincu depuis des décennies qui dicte sa loi et ne fronce jamais le sourcil. Une sorte de célébration de cette légende, mais néanmoins pas une célébration de la violence, simplement un regard externe et une étude de ce qui a pu mener à une telle animosité, toutes ces familles ayant en commun des aïeux, les mêmes racines, mais aussi la même haine. Il est d'ailleurs surprenant de voir des mômes hauts comme trois pommes imposer devant la caméra des regards déjà riches en puissance et poussant à baisser les yeux.
Les femmes, quant à elles, ont un avis plus mitigé, elles sont fières de leurs maris quand ils sont vainqueurs, mais n'hésitent pas à affirmer qu'elles aimeraient que tout ce non sens finisse un jour par s'arrêter.
Bref, Knuckle est un documentaire choc d'une violence renvoyant très loin les combats de Snatch. Les affrontements passionnent, ainsi que l'évolution au fil des années, et il est d'ailleurs impressionnant de voir un gringalet ayant été battu devenir une masse de muscles méconnaissable et imposante.
L'ensemble ne se cantonne pas à exposer de la violence basique pour un amateur lambda, car si effectivement l'on en voit, la plus grosse partie est réservée aux témoignages des différents intervenants, afin de cerner leurs motivations et s'immerger convenablement dans ce milieu très fermé. Fermé à un point que certains demanderont même à ne pas être filmés, et peu ont pu avoir la chance de s'y introduire, et c'est bien normal, cette « mafia » étant sous étroite surveillance des autorités, celles-ci n'hésitant pas à déployer barrages et hélicoptères pour tenter de les intercepter. Il est d'ailleurs à noter que ces combats ne sont pas là que pour régler les litiges, mais sont aussi l'occasion de brasser de l'argent, les mises pouvant atteindre près de 100.000 livres.
Pour conclure, les amateurs de documentaires originaux dépeignant des milieux marginaux et illégaux auront là un produit qui les dépaysera et les introduira dans un univers inédit. La violence — réelle — étant de mise, et ses personnages étant souvent patibulaires, il est cependant clair qu'une bonne partie des spectateurs auront du mal à y trouver un intérêt.
Mention spéciale pour James Quinn McDonagh, qui du haut de ses cinquante années n'hésite pas à continuer ses combats. En effet, contrairement à la boxe légale, il n'y a pas de pause, et c'est dans l'âge que se situe la force, le cuir étant tanné et les poings durs comme du roc.