Jeu de stups
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"Mais que fait la police ?"...
Dite de façon énervée ou ironique, cette question n'en finit pas de faire se gendarmer les policiers ! Car, justement, la Police fait son travail. Ou plutôt, elle essaie de le faire, dans des conditions souvent difficiles, voire périlleuses.
Et si ce film de Bertrand Tavernier a tant fait tousser en haut lieu, c'est parce qu'il montre des flics aux prises autant avec des dérèglements internes qu'avec les voyous à arrêter !
Et depuis, dans les commissariats, tout baigne ? Vus les mouvements de grogne qui se sont répétés, pas vraiment de quoi être menottée à cette conviction.
Sur l'écran, ça démarre fort. Lulu (excellent Didier Bezace), enquêteur foi et fougue, rate une arrestation... car son ivrogne de patron exige le "sous-marin" (véhicule de surveillance) pour rentrer au radard jouer à touché-coulé avec bobonne !
Altercation. Mutation sanction.
Retour à la case départ, le bureau des plaintes imbéciles et tonus retrouvé au sein d'une des brigades anti-drogue de quartier à Paris. Suit une effarante tranche de vie policière, mi-fiction mi-documentaire.
Au bout de 2 h 30, on sait à peu près tout sur ces flics-là, à cette époque-là.
Leur dégaine passe-partout, leurs méthodes et leur courage sur le terrain pour tenter des arrestations à haut risque.
Leur jargon coloré ("planques" dans le "soum'" face aux dealers et "tox" à "serrer" en "flag"). On les voit arrêter surtout des Noirs, réalité sans racisme, sans être eux-mêmes tout à fait blancs avec leurs contacts contre nature : les "cousins", autrement dit les indicateurs, ou encore une épave humaine prise en affection.
Et aussi leur errance par nécessité, leur solitude par goût, leur isolement social par fonction...
Tout ça au nom de la loi anti-drogue, "L.627", qui sert de manière intrigante de titre.
Toujours en resituant dans le contexte de l'époque, il faut suivre également la caméra très mobile de Bertrand Tavernier sur le terrain polémique. En clair, l'Etat traitait (traite ?) vraiment très mal ceux qui ont la rude mission de faire respecter les lois. Sur le plan administratif, la brigade travaille dans des conditions déplorables. Bureaux exigus dans une sorte d'abri de chantier où le ménage strict minimum parasite le service. Matériel nul. Plein d'entraves pratiques comme les carbones archi-usés pour établir les procès-verbaux...
Cela joue sur le moral, la motivation, l'efficacité... Ils l'ont tous amer. Poulets au vinaigre !
Farces de potache, humour noir ou cynisme assumé pour tenir le coup.
Cafouillages et glandouillages comme mamelles du quotidien.
Les psychologies sont plus ou moins dessinées, d'où ressortent les personnages de Lulu, Tonio et Marie la fliquette (Charlotte Kady, jeune et jolie débutante).
Mais c'est surtout le jeu aiguisé des acteurs qui fait avouer spontanément, à la fin, que voilà du bon cinéma vérité !
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Créée
le 3 sept. 2017
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