L'Affaire Crazy Capo est un petit polar français de 1973 produit par Sergio Gobi qui est totalement tombé dans l'oubli et qui effectivement ne propose rien qui soit à même de marquer profondément les esprits. Le film est la toute première réalisation de Patrick Jamain qui ensuite se tournera vers la télévision pour ne revenir sur grand écran que 12 ans plus tard avec un second et dernier long métrage, Lune de Miel avec Nathalie Baye. Si le film n'est pas désagréable à suivre c'est essentiellement pour son ambiance seventies et son casting car pour le reste on a surtout la sensation d'un joli potentiel jamais exploité à sa pleine valeur.
L'Affaire Crazy Capo nous raconte donc l’histoire de Jean Diserens homme d'affaire a priori tout ce qu'il y-a de plus respectable mais mouillé jusqu'au cou dans le trafic de drogue. Quand il décide d'étendre son empreinte et son empire en vendant toujours plus avec de nouveaux partenaires internationaux il doit faire face à la réticence de son supérieur et parrain local Joseph Marchesi dit Crazy Capo. Diserens décide alors de supprimer Crazy Capo avec l'aval et l'aide de son propre fils, provocant alors une série de meurtres et règlements de compte pour prendre le leadership de la pègre.
L'affaire Crazy Capo est donc un polar qui baigne dans une ambiance de film de maffia à la française (Le Parrain est sorti un an auparavant) avec de nombreux ingrédients qui aurait pu en faire un bon film mais qui malheureusement ne seront jamais vraiment développés à l'écran. L'opposition entre les vieux gangsters avec certaines valeurs et les nouveaux délinquants en col blanc prêts à tout pour étendre leur empire comme des capitaines d'industries, les aspects psychologiques et dramatiques d'une guerre de successions poussant les alliés d'hier à s’entre-tuer, l'enquête policière mené par un flic flegmatique … Cela suffisait déjà à faire un bon petit film à condition bien sur de venir étoffer l'écriture des personnages et leurs liens pour que l'on comprenne à minima les enjeux dramatiques qui viendront les opposer. Car dans L'Affaire Crazy Capo on se retrouve assez vite à regarder une succession de régalements de compte et de meurtres dont on se moque un peu tant ils n'ont jamais le moindre impact dramatique ni enjeux émotionnels pour les spectateurs. La seule et unique relation un peu développé entre les personnages reste les troubles liens qui unissent Jean Diserens (Maurice Ronet) et le fils de Crazy Capo (Antonio Cantafora) entre relation père/fils et troubles amoureux avec l'homosexualité du personnage interprété par Maurice Ronet. Pour le reste malheureusement tout semble terriblement désincarné et ce 'est pas la mise en scène peu inspiré de Patrick Jamain qui permet de simplement se contenter des scènes d'actions à l'image d'une à priori spectaculaire évasion de prison à l'aide d'un hélicoptère que l'on regarde avec le même enthousiasme grisant qu'une scène de dialogue. On aurait aussi aimé que le rôle du flic soit plus important et apporte là aussi une petite tension dramatique supplémentaire, mais l'enquête semble bien trop pépère et tranquille pour venir ajouter un peu de piment à l'ensemble.
On se contentera donc du plaisir d'un très bon casting avec pour commencer Maurice Ronet impeccable en homme d'affaire dur et froid comme la glace et ses quelques failles sentimentales vis à vis du jeune homme qu'il prend sous son aile. Bien qu'il n'est pas grand chose à défendre Jean Pierre Marielle est excellent dans son rôle de flic un peu dépassé par les événements et l'on retrouve également au casting Alice Saprich en tenancière de bordel, Jean Servais dans le rôle de Crazy Capo et cette bonne trogne de faux cul de Michel Peyrelon dans forcément un rôle de traître un peu misérable. Si globalement le film ne marque pas durablement les esprits quelques scènes restent assez réussies comme ce règlement de compte lors d'une partie de chasse au bord d'un étang brumeux (ambiance La Traque), la confrontation entre Maurice Ronet et Jean, Pierre Marielle lors d'un interrogatoire et Antonio Cantafora explorant le grenier de son père Crazy Capo et découvrant les souvenirs de son passé de clown dans un joli moment de nostalgie appuyé par la partition de Vladimir Cosma.
On va se dire que L'Affaire Crazy Capo aurait sans aucun doute trouvé une toute autre dimension avec une écriture plus fouillé et une mise en scène un peu plus à la hauteur d'enjeux dramatiques plus importants et complexes. En l'état L'Affaire Crazy Capo reste un bon petit polar à redécouvrir à défaut de devoir être réhabiliter de toute urgence.