Jeanne de Valois, Comtesse de la Motte, en a marre d’être humiliée et de vivre aux crochets du cardinal de Rohan, elle décide donc de lui faire croire qu’elle est dans les faveurs de la reine, Marie-Antoinette d’Autriche, pour qu’il achète une parure invendable mais très belle à son compte. L’Histoire retiendra ce fait divers célèbre pour le rôle qu’il a joué dans la Révolution Française.
Dieu, ce que ce film est horrible. Les costumes sont horribles, les décors sont lambdas (sauf peut-être ceux de Versailles où ils ont dû tourner), la réalisation ne fait que des plans fixes et des plans poitrines (essayez d’avoir de l’affection pour un film qui ne monte pas plus haut que le plan poitrine), j’entends presque la bobine tourner et le clapman dire « action » au début de chaque plan, quant aux acteurs, ils jouent avec une artifice théâtrale qui a très mal vieilli. Tous sont apparemment très bons (et célèbres) et ont eu l’occasion de démontrer leurs talents depuis. Je n’ai pas eu cette chance et cette monotonie de ton et certaines de leurs voix ont eu raison de ma santé mentale, par moment. Bon, après, le son ne me semble pas d’une qualité inouï : je pouvais entendre la bobine tourner sur Youtube, où le film est libre d’accès.
La faute probablement à son époque : L’affaire du collier de la reine est sorti en 1946, un an après la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Certainement pas un très bon moment pour faire du cinéma et probablement l’une des premières tentatives de relancer la machine française. Dès lors, je ne peux que saluer l’effort car, même si on sent qu’ils ont des moyens moyens, on sent qu’ils essayent quand même d’avoir les moyens.
Mais le truc à sauver est son scénario : les dialogues laissent certes à désir mais c’est probablement parce que j’avais le sentiment d’entendre des enfants réciter une pièce de Molière ou de Racine, alors qu’ils ne savent à peine réciter des vers en alexandrin, qu’ils n’ont rien compris à la pièce et qu’ils ont dormi la moitié du cours, avant que leur prof ne les réveille pour leur faire lire un passage. Bon, bah, là, ils sont quand même des professionnels !
Le scénario au début, malgré des introductions de personnages parfois maladroites, est très bien amené : on suit une série d’embranchements qui doivent nous mener à comment les protagonistes se sont rencontrés et comment la comtesse décide de l’arnaque (les ficelles de l’arnaque sont peut-être justement très peu abordées mais bon). Il y a aussi une belle introduction de la cour de Versailles et de son étiquette, peut-être un peu trop longue.
Ce qui est aussi intéressant ce sont les caractéristiques des personnages qui sont typiques du cinéma des années 30 : il y a la femme belle et innocente mais victime du jeu du sort, la femme fatale qui manipule et met tout le monde dans la merde sans aucune honte, jusqu’à ce qu’elle tombe amoureuse (au passage c’est le coup de foudre le plus maladroit que j’ai jamais vu), l’amoureux transi, le(s) bon(s) vivant(s), le corniaud, l’extravagant qui est en fait drôle et gentil…
Dans l’ensemble, il y a « les femmes belles, responsables conscientes ou pas des malheurs autour d’elle » et « les hommes, pauvres imbéciles naïfs qui se font avoir en grands fous qu’ils sont ». Un cliché très drôle, qui existait beaucoup à l’époque mais qui n’a pas forcément très bien vieilli. Certes, la comtesse de la Motte n’était pas un enfant de cœur mais elle avait des complices dans son arnaque (bon, certains ne savaient pas ce qu’ils faisaient mais quand même !), elle n’est pas non plus la garce que l’on décrit, avec pour seule qualité son amour pour le chevalier.
Mais bon, si le scénario a bien un défaut, c’est son manque d’historicité : à la moitié du film, l’histoire et l’Histoire partent un peu en sucette et on perd un peu le côté thriller qu’on avait au début, pour se précipiter dans un gloubi-boulga de péripéties grotesques et surjouées. On vient de se libérer d’une occupation indésirable, fasciste et un brin impérialiste ? Rappelons que nous, français, aimons abattre la monarchie et le despotisme ! On a fait l’effort d’ouvrir un bouquin assez précis et nuancé sur l’affaire mais on veut rester dans les clichés historiographiques habituels ? Pas de problème, montrons Marie-Antoinette comme gentille puis laissons sous-entendre qu’elle a mérité ce qui lui arrive.
La fin est longue et mélodramatique au possible et pour quelques qualités par-ci, par-là, ce film se noie dans un mélange insalubre de détails techniques qui en font une œuvre qui a très mal vieillie. A regarder par curiosité mais sinon, passez votre chemin avec plaisir.