L'Alphabet
6.3
L'Alphabet

Court-métrage de David Lynch (1968)

Un enfant vient au Monde mais ne sait pas y naître. Il découvre comme il est dur d’assimiler ses règles et combien cet impératif arrache à soi-même pour imposer une logique extérieure. Lynch exprime la violence du décryptage forcené de la réalité, censé être traduit par des œillères toxiques, malsaines, agressant l’intégrité de l’esprit et la pureté de la volonté originelle (l’explorateur se métamorphose en pion emmuré).

The Alphabet peut être perçu comme un film à charge au sens esthétique, dédaignant les méthodes d’apprentissages anti-intuitives consacrant les enfants et par extension les Hommes comme des récipients du Savoir, au lieu de les édifier en titillant leur nature. Lynch a chargé sa propre fille Peggy d’exprimer ces borborygmes de faible envergure face à la triomphante ritournelle structurée. Ces convulsions régressives exhibent un enfant résistant au sacrifice de sa conscience vierge et absolue à la pseudo-science vouée à lisser la condition humaine.

Le premier "véritable" métrage de Lynch (il dure 4 minutes) a été financé grâce à la vente de Six figures, dont il retient certains aspects graphiques, avec ses dessins retouchés, son inertie troublée par des formes crues (entrailles, sang, croquis grotesques) et ses fonds pastels macabres. S’y ajoutent des sonorités aberrantes et des digressions étranges où les lettres de l’alphabet se transforment en monstres bienveillants ; la peste ne contamine plus simplement le corps mais tout l’esprit, par une intrusion brutale et sentencieuse. Le corps se vide pour mieux céder.

Pour le spectateur contemporain, The Alphabet revêtira un côté Ju-On dans sa dernière moitié : on y voit un corps féminin, crispé et anémié assailli par des éléments absurdes et surnaturels.

Créée

le 24 déc. 2013

Critique lue 558 fois

12 j'aime

2 commentaires

Zogarok

Écrit par

Critique lue 558 fois

12
2

D'autres avis sur L'Alphabet

L'Alphabet
Zogarok
7

Critique de The Alphabet par Zogarok

Un enfant vient au Monde mais ne sait pas y naître. Il découvre comme il est dur d’assimiler ses règles et combien cet impératif arrache à soi-même pour imposer une logique extérieure. Lynch exprime...

le 24 déc. 2013

12 j'aime

2

L'Alphabet
Fatpooper
8

Tu viens dormir avec moi?

Une fois de plus c'est glauque. On retrouve des éléments qui reviendront plus tard dans ses longs métrages (thématiques, ou objets). L'idée de base est géniale: un cauchemar d'une petite fille qui...

le 21 mai 2012

4 j'aime

L'Alphabet
Fêtons_le_cinéma
8

Perdre, le temps d'un songe, la maîtrise de notre langage

Avec The Alphabet, nous plongeons dans les visions cauchemardesques d’une femme perdue dans son alphabet au point de ne plus reconnaître dans la lettre que sa forme extérieure et esthétique : si les...

le 2 juil. 2019

3 j'aime

Du même critique

La Haine
Zogarok
3

Les "bons" ploucs de banlieue

En 1995, Mathieu Kassovitz a ving-six ans, non pas seize. C'est pourtant à ce moment qu'il réalise La Haine. Il y montre la vie des banlieues, par le prisme de trois amis (un juif, un noir, un...

le 13 nov. 2013

51 j'aime

20

Kirikou et la Sorcière
Zogarok
10

Le pacificateur

C’est la métamorphose d’un nain intrépide, héros à contre-courant demandant au méchant de l’histoire pourquoi il s’obstine à camper cette position. Né par sa propre volonté et détenant déjà l’usage...

le 11 févr. 2015

48 j'aime

4

Les Visiteurs
Zogarok
9

Mysticisme folklo

L‘une des meilleures comédies françaises de tous les temps. Pas la plus légère, mais efficace et imaginative. Les Visiteurs a rassemblé près de 14 millions de spectateurs en salles en 1993,...

le 8 déc. 2014

31 j'aime

2