Pour adapter cette pièce de Jacques Sommet (mise en scène par Bernard Blier en 1955 au Comédie-Comartin), Jacques Pinoteau a fait appel à un duo d'auteurs spécialisés dans le vaudeville: Jean Girault et Jacques Vilfrid (les auteurs de Pouic Pouic). Les trois hommes en font une comédie populaire solidement écrite, assez consensuelle sur le papier mais qui gagne en intérêt une fois portée à l'écran.


Toute une équipe de comiques de cabaret est présente: Darry Cowl est l'ami de la famille, le couple Raymond Bussière/ Annette Poivre les parents, Micheline Dax la tante. Le fils est joué par un Jean-Claude Brialy dont c'est le premier film, sa petite amie par la ravissante Béatrice Altariba et la fille par Pascal Audret. Il y a également en seconds rôles Jean Lefèvre, Robert Berri et Roger Carel.


Chaque personnage est donc très bien campé, et le film révèle tout le potentiel comique de Darry Cowl. C'est un poète, il porte tout son univers et Pinoteau a sut s'en servir. Sans avoir un quelconque talent supérieur, le metteur en scène soigne son film et propose quelques idées de mise en scène intéressantes:


Les incessants allez retour de Darry Cowl au début du film tâchant de reconquérir sa compagne, les gros plans sur son doigt gigotant sur la sonnette, il y revient sans cesse après s'être fait claquer la porte au nez à chaque fois. On met bien en valeur son personnage de Candide naïf, enfantin et remuant.


On retrouve les origines théâtrales du film dans le lieu clos, la maison de la petite famille bourgeoise. Le comique consiste à regarder Darry Cowl bousculer ce lieu, y installer son univers, son extravagance alors que la famille qui l'héberge par pitié voit son quotidien bouleversé par cet étranger saugrenu. Il envahit l'espace, fait le tour de la maison dans son footing du matin, ouvre toutes les fenêtres en plein hiver, installe son piano, se lève pour boire la nuit au vieux robinet faisant un boucan terrible.
La tante jouée par une excellente Dax essaie de lui faire passer un teste psychologique qui révèle une nature meurtrière. Cette totale contradiction avec l'insouciance enfantine du personnage laisse apparaître l'impossibilité de cerner sa psychologie, son comportement farfelu. C'est une idée assez poétique.
Il y a un dernier plan assez beau où il joue du piano, dans son nouveau petit monde, entouré de la petite famille alors que les fenêtres sont grandes ouvertes et qu'autour d'eux tout s'envole.


Après ce n'est pas parfait non plus. Pinoteau ne parvient pas toujours à éclipser le style cabaret de son film et se contente souvent de laisser ses comiques faire leur numéro. Il y a également cet humour franchouille qui a prit un coup vieux. Il y a une scène où Annette Poivre veut boire dans le verre de Darry, il se précipite pour essayer de l'en empêcher (car il a empoisonné son verre pour se suicider), s'en suit une petite bataille ou tout à coup retenti l'air de "chevalier de la table ronde goûtons voir si le vin est bon"... c'est pas très recherché comme gag.


Au final c'est un spectacle honorable, un peu insipide mais pas désagréable.

grisbi54
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le 29 août 2020

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