Ouch. C'est peu dire que je ne m'attendais pas à une telle déconvenue de la part de Kaneto Shindō... L'exploration de sa filmographie s'était faite extrêmement agréable jusqu'à présent, avec une mosaïque de propositions originales autour de ce que je considère comme un jalon du cinéma : Onibaba (ainsi que L'Île nue et The Black Cat). Mais c'était sans compter "L'Anneau métallique", une œuvre particulièrement désarçonnante dans laquelle on retrouve l'actrice fétiche (devenue son épouse) de Shindō, Nobuko Otowa, dans le rôle d'une femme cherchant à se venger de son mari qui la trompe (ou qui l'a quittée, ce n'est pas tout à fait certain) pour une autre, beaucoup plus jeune et libérée sexuellement. Le principal problème, qui constitue en outre le principal parti pris, tient à la forme de ce récit à la lisière du conte, qui adopte les codes du théâtre nô — dont le film est une adaptation. Les personnages sont modernes, mais la narration fragmentée entre différents niveaux de réalité emprunte à son matériau original de nombreux artéfacts : les chants, la gestuelle lors de certaines séquences, ainsi que les maquillages, avec ces visages blancs qui dégagent quelque chose de très bizarre dans un film en couleur. Le premier que je vois de la part de Shindō, d'ailleurs.


Cela aurait pu constituer les prémices d'un exercice de style envoûtant, dans la lignée du magnifique "Onibaba", mais il n'en sera rien. Le film est tout entier composé d'une répétition du même motif : l'homme trompant sa femme dans une chambre d'hôtel, la femme se livrant à une malédiction en forêt (elle enfonce un pieu dans une figurine de paille contre un arbre) résultant en d'incessants appels téléphoniques dans la chambre du couple adultère. Un harcèlement qui vire vite à l'épreuve aussi pour le spectateur malheureusement... Et cela pendant 1h30, avec quelques virées oniriques autour de la femme trompée qui se transforme en démon, directement inspiré du théâtre nô.


Il est bien difficile d'accepter le format de cette proposition, sans même parler du fait qu'on ne comprend pas pourquoi les amants ne débranchent pas le téléphone... Ça paraît totalement stupide. Le mélange traditionnel et contemporain n'est en plus pas très agréable : on passe ainsi à côté d'une thématique chère à Shindō, à savoir la sexualité féminine. Dans cet hôtel extrêmement allégorique, avec tous les employés peinturlurés et assortis de dialogues laconiques, la dissolution des deux horizons ne s'opère pas de manière constructive. Un exercice de style raté.

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le 9 déc. 2020

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Morrinson

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