« Tu cherches ton pote le général hein ? Hé ben il fait un méchoui avec ses couilles sur Hollywood Boulevard. »
Le buddy movie est un genre que Shane Black a aidé à développer. Certes, il n’est pas le premier puisqu’aux USA Walter Hill avait déjà sorti 48 Heures en 1982 avec Nick Nolte et Eddy Murphy au casting. Mais peu de réalisateurs se sont collés au genre depuis et il faut attendre Shane Black et son Arme Fatale pour que le film de pote devienne à la mode.
En effet, c’est après la réalisation de Richard Donner que naitront des titres comme Double Détente, Tango & Cash, Le Dernier Samaritain ou encore les Bad Boys de Michael Bay. Mais si tous ces long-métrages tendent vers la comédie d’action, on oublie beaucoup trop facilement que le premier Arme Fatale est un film sérieux et bien plus noir que ses différentes suites.
Et pourtant le premier plan de Mel Gibson donne le ton. Martin Riggs se réveille à poil dans un lit défait, la clope au bec, toussant et on aperçoit un flingue glissé contre l’oreiller. Il se lève l’air désabusé, abattu et commence sa journée par une bière. Complétement à l’opposé, on fait la connaissance de Roger Murtaugh dans son bain. Sa famille débarque pour son anniversaire : joie, sourires et éclats de rire sont tout l’opposé de la vie de Martin. Même physiquement la différence est là puisque Murtaugh est vieux, moustachu et noir et s’habille en costards alors que son futur partenaire vit pour les jeans et les bottes.
Ils vont être forcé à bosser ensemble suite au meurtre d’une jeune femme, liée à Murtaugh qui connait son père. On veut éviter à l’un d’être trop personnellement impliqué dans une affaire et on impose un partenaire à l’autre parce que Riggs a des tendances suicidaires. C’est un élément que les suites ont oublié : si le personnage de Gibson reste jusqu’auboutiste (et toujours capable de courir des distances incroyables pour poursuivre des voitures à pieds), les scénaristes suivant ont oublié qu’il avait un trouble du comportement suite à la disparition de sa femme. C’est en cela que la scène où il se retrouve seul chez lui et se met un pistolet dans la bouche et celle où son partenaire lui en colle un sur la tempe pour voir jusqu’où il est prêt à aller sont incroyablement puissante.
Les suites (Shane Black s’étant contenté de pitcher uniquement le second film) préféreront mettre l’accent sur l’humour et le comique de répétition. Si les différents volets ont tous des qualités, ils virent assez vite à l’auto-parodie.
L’Arme Fatale premier du nom est donc un film plus sombre à cause du personnage de Riggs mais aussi grâce à celui de Murtaugh qui, sans doute mû par ses valeurs familiales, va prendre Martin sous son aile, le rejetant d’abord mais finissant par le traiter comme il aurait traité son propre fils.
Au delà du duo évoqué, L’Arme Fatale est aussi une histoire solide grâce à deux méchants charismatiques. Le démarrage de l’histoire et l’enquête qui va conduire Riggs et Murtaugh à mettre la main sur le Général McAllister et son complice Monsieur Joshua sont assez linéaires mais posent les bases d’une deuxième partie de haut vol, un face à face mémorable gentil contre méchant qui se déroulera en plusieurs scènes montrant tout autant le talent de Martin au tir sniper que l’envie de Riggs de protéger sa famille quel que soit le sacrifice.
Shane Black écrit là d’excellents personnages, de savoureuses lignes de dialogues devenues cultes, quand Richard Donner livre un film à la réalisation maitrisée. On retiendra en particulier le combat final entre Mel Gibson et Gary Busey sous la pluie forcée d’une bouche à incendie explosée. Malgré l’obscurité et la caméra portée, la scène reste parfaitement lisible. Enfin il ne faudra pas oublier de mentionner l’excellente bande originale, audacieuse collaboration entre Michael Kamen et Eric Clapton.
Au final, non content d’être un excellent film d’action, aux dialogues finement écrit et portés par deux excellents acteurs, L’Arme Fatale invente le genre. Toujours imité, jamais égalé ?