Ombres sans soleil

Une plongée glaçante et implacable au sein d'un réseau de résistants filmée dans le style particulier de Melville. Les lenteurs habituelles dont ce dernier fait preuve sont néanmoins soutenues par la force tranquille et l'ambiance pesante qui se dégagent de l'ensemble à chaque instant. L'ambition quasi documentaire du film confère souvent aux scènes une crédibilité qui renforce leur impact de manière viscérale, mais le désordre dans la structure chaotique du récit rogne sur les fondamentaux scénaristiques.
Difficile d'adhérer à ces personnages volontairement antipathiques, on ne perçoit pas suffisament leur rôle concret et les conséquences de leurs actions, du coup la stature des personnages s'érode et on a parfois l'impression de voir des individus un peu trop imbus d'eux même qui jouent aux durs. Le jeu gouailleur des acteurs manque parfois de naturel par rapport au ton souhaité et certaines scènes flirtent avec l'invraisemblance comme la fameuse fusillade des tireurs nazis aussi doués de la gachette que les inconnus avec la galinette cendrée. La voix off tente de remédier aux carrences scénaristiques par des commentaires explicatifs qui trahissent par là même les problèmes narratifs. Je n'ai pas apprécié non plus le procédé trompeur des écritos de fin qui nous informent sur le sort funeste des personnages comme s'ils avaient réellement existé, c'est aller un peu trop loin dans le faux réalisme. Ce classique du cinéma français est certes un poil survendu mais la force qui se dégage de l'ensemble rend l'expérience saisissante.