Après une première projection lors du festival de Londres en octobre 2021, The Phantom of the Open a trouvé des distributeurs pour sortir dans les salles obscures au Royaume-Uni, puis en VOD un peu partout dans le monde, y compris chez nous il y a quelques jours. Et c'est heureux car ce film, rebaptisé sans grande inspiration L'As du golf en français, mérite amplement de faire une belle carrière commerciale tant ses qualités artistiques sont nombreuses. On passera sur quelques erreurs et incohérences à propos du jeu de golf que seuls quelques puristes de la petite balle blanche relèveront, elles sont sans conséquence et ne desservent pas le propos de l'histoire, sauf peut-être une scène vers la fin, complètement anachronique et hors de propos, où un jeune golfeur noir qui s'apprête à passer professionnel prononce un discours dans lequel il remercie le personnage principal du film de l'avoir inspiré...
De golf, il n'est en réalité que peu question dans le film de Craig Roberts, qui s'attache à raconter la vie, plus que la « carrière » sportive, de Maurice Flitcroft. Ce simple grutier sur un chantier naval de la côte Ouest de l'Angleterre devint là-bas un (anti)héros populaire que les journalistes de l'époque surnommèrent « le pire golfeur du monde ». C'est que Maurice, père de trois enfants - un adopté et deux jumeaux - avait un peu de mal à joindre les deux bouts, et eut en tombant sur une retransmission de golf à la télé l'idée de tenter sa chance dans ce sport, où les dotations représentaient facilement plusieurs mois du salaire d'un ouvrier. Sans connaissances, sans matériel et surtout sans aucune maîtrise technique, ce doux rêveur alors âgé de 46 ans s'inscrivit au culot au British Open de 1976 en prétendant être golfeur professionnel, et signa lors du premier tour des qualifications le plus haut score jamais enregistré dans l'histoire de The Open : 121 coups, soit 49 au-dessus du par... Banni le soir même par les très rigides instances dirigeantes du golf britannique, Flitcroft effectua ultérieurement plusieurs autres tentatives pour participer au plus grand tournoi du monde, grimé de perruques et fausses moustaches et enregistré sous des pseudonymes aussi impayables que Gene Paychecki et James Beau Jolley !
On s'attache donc très vite à cet étonnant personnage, époux et père de famille aimant qui décide de se lancer à la poursuite de ses rêves plutôt que de continuer à trimer. Excellemment interprété par Mark Rylance, ce Maurice Flitcroft est tour à tour ridicule, touchant, admirable, et emmène dans son sillage une poignée d'autres personnages remarquables, à l'image des jumeaux, champions internationaux de danse disco ! Véritable feel-good movie qui n'est pas sans rappeler Joue-la comme Beckham et qui plaira assurément même à ceux qui ne connaissent pas grand-chose au golf, The Phantom of the Open fera, espérons-le, une meilleure carrière que son héros !