Une adaptation décevante de la BD "Charly"
J'attendais beaucoup de ce film, adapté des 4 premiers tomes d’une série de bandes dessinées fantastiques que j'adore, "Charly" dont les auteurs sont Magda (dessinatrice) et Denis Lapière (scénariste). Cette série a été publiée entre 1990 et 2007 (date de parution du 13ème et vraisemblablement dernier volume), d'abord dans le Journal de Spirou puis repris en albums par l'éditeur belge Dupuis dans la collection "Repérages". Malgré sa qualité et son ambition (ou peut-être justement en raison de cela), la série n'a jamais trouvé son public. Il est vrai que lorsqu'on prend en main le 1er volume, "Jouet d'enfer", le lecteur s'attend plus à trouver une BD destinée à un jeune public, voire à des enfants, mais il change très vite d'opinion à la lecture du volume, lorsque Charly voit son père être happé sous ses yeux par une créature marine géante sur une île de la Frise dévastée par la tempête. En effet, le style de Magda, très épuré, très "ligne claire", est trompeur. En réalité, elle et son complice Denis Lapière nous entraînent, sans sembler y toucher, dans une histoire fantastique dont nous suivrons le héros, Charly, de l'enfant traumatisé par la mort terrifiante et inexpliquée de son père, à l'adolescent perturbé accusé de meurtres qu’il n’a pas commis.. On voit qu'on est très loin de la gentille « aventurette » à laquelle semblait nous être destiner la couverture et à les premières images de la BD.
Voilà pourquoi, séduit moi-même par l'aspect inclassable de cette histoire, je m'attendais à mieux de la part de Cédric Kahn, qui est le réalisateur de l'excellent Roberto Succo (2001). Je suis le premier à faire crédit à un réalisateur de cinéma et accepter qu'il prenne des libertés avec l'œuvre originale qui l’a inspiré mais je sais aussi reconnaître les échecs. Et, dans ce cas, cette adaptation est un échec.
Déjà, le titre "L'avion" aurait dû me mettre sur mes gardes. Donner à l'engin (un jouet futuriste dans la BD) - une simple maquette de planeur dans le film - "le" rôle principal était une erreur complète car on comprend relativement vite dans la BD que c'est Charly (et non le jouet !) qui a des pouvoirs incontrôlables. C’est un contresens inexcusable. Le réalisateur s'est fourvoyé dans son adaptation et il n'a rien compris à l'univers fantastique des auteurs de Charly. Dans le jargon d’un prof, on dirait qu'il est "hors sujet". J'espérais naïvement que le réalisateur respecterait la complexité de cette histoire qui navigue entre fantastique, science-fiction, parapsychologie, thriller et espionnage.
Il y a cependant dans le film de bons passages mais tout est annihilé par une fin grotesque, digne des pires navets hollywoodiens, qui affaiblit l'histoire en lui retirant tout ce qui faisait son intérêt fantastique.
C'est d'autant plus regrettable que les acteurs, Isabelle Carré, dans le rôle de la mère de l'enfant et Vincent Lindon, qui incarne son mari et le père de Charly, sont impeccables. Mais, comme je l'ai déjà souvent constaté dans les films mettant en scène de jeunes enfants, ceux-ci, par la fraîcheur et la vérité de leur jeu, éclipsent souvent les acteurs confirmés qui leur donnent la réplique. Ici, le jeune acteur qui incarne Charly est un inconnu du nom de Roméo Botzaris. J'ai eu beau chercher, je n'ai pas trouvé grand-chose sur lui, si ce n'est qu'il serait né en 1997. Il avait donc 7 ou 8 ans lorsqu'il a tourné ce film ; il doit en avoir 17 à présent. Il semble bien qu'il n'ait plus tourné depuis. Personne n’a l’air de savoir ce qu'il est devenu. C'est très dommage qu'il n'ait pas continué la carrière d'acteur car je suis persuadé qu'il aurait pu y être excellent. Si quelqu'un a des nouvelles de lui, je me ferai un plaisir de m’en faire l’écho.