Entre le scandale Lemon Incest et le départ pour le pensionnat en Suisse, Charlotte Gainsbourg s’illustrait dans L’Effrontée de Claude Miller. Un petit film où elle arbore jean et marinière et où il s’agit de la confondre comme une sorte de croquis miniature de son père, de réplique fidèle donc escamotée, rêveuse et censément spiritueuse et touchante. La banalité intrinsèque du film est compensée par le succès de cette recherche iconique. Charlotte est une gamine masculine dans l’allure et fille manquée dans les traits, maladroite, hésitant entre son statut d’enfant mature et l’abandon à son état d’ado précocement névrosée.
Lors d’un été où elle s’ennuie, elle découvre son ambivalence sexuelle, ses attirances et ses espoirs profonds, expérimente la vie, cherche la cohérence en elle-même et dans l’extérieur, aborde sa féminité avec peine. Partagée entre confiance en ses illusions et défiance exagérée envers ses proches, elle est opprimée par une mère-castratrice, psychorigide bienheureuse et coquette du dimanche la coupant d’elle-même et de ses inspirations.
Miller filme l’âge ingrat dans un style relativement plat et coutumier. L’existentialisme du film est tempéré par une description littérale et pratique des symptômes d’une adolescence éruptive (ponctuée -voir arraché à la torpeur- par quelques excès cinématographiques), le portrait est averti et le personnage attachant dans sa quête d’amour et de considération. Aujourd’hui, L’Effrontée jouit d’une forte valeur émotionnelle auprès de ceux qui ont pu s’identifier à Charlotte et son histoire il y a déjà un quart de siècle, ou qui pourront encore s’y retrouver ; pour les autres, c’est un "film d’été" plus subtil que la moyenne mais bien pauvre et téléfilmique néanmoins.
http://zogarok.wordpress.com/2014/07/30/seances-express-n8/