Sacré Bruno Dumont. Le bonhomme persévère sur la voie comique amorcée avec Ma Loute, étendue à son diptyque sur Jeanne d'Arc et à ses deux mini-séries. S'attaquant pour la première fois de plein pied à la science-fiction, nombreux sont ceux qui craignaient une banale parodie de Star Wars.
Pourtant, L'Empire est avant tout et définitivement un film de Bruno Dumont. Plutôt que de trivialement singer les codes de la saga canonique, le cinéaste s'en sert pour opérer une série de contrastes singuliers.
Les raccords et clash brutaux entre l'espace intersidéral et les habituels paysages nordiques, entre des vaisseaux spatiaux (qui mixent l'esthétique de Star Trek et l'architecture des grandes cathédrales françaises) et des tracteurs et autres bateaux de pêcheur, ainsi qu'entre des entités mégalomaniaques et des figures prosaïques, n'ont pas pour unique but de provoquer l'hilarité.
En intégrant toutes ces gueules cassées et autres innocentes jeunes filles à ce vaste décorum épique, Dumont clame haut et fort un éloge incessamment reconduit au fil de sa filmographie. Celui du médiocre, qui aux même titre que les héros archétypiques mérite de s'inscrire dans les grands mythes fondateurs et y accomplir une fabuleuse destinée.
Il en résulte, de par une attention toujours soutenue aux corps, mimiques et particularismes de ses acteurs ou non-acteurs, une remarquable tendresse qui débouche sur l'œuvre peut-être la plus ouvertement sensible de son auteur.